Amis blogueurs, bonjour !
Voici vos contributions relatives à mon Enigma n° 85 :
Quelques tire-bouchons figuratifs types Gagnepain ou Delaporte... consacrés aux bébés.
Pas de solution aujourd'hui, mais des pistes intéressantes...
En introduction, j'avais présenté mon article comme une "contribution en faveur d'un sursaut de la natalité"... je ne croyais pas si bien dire, puisque dès le lendemain, le journal local Le Républicain Lorrain titrait :
"La peur de l'avenir pousse de plus en plus de jeunes adultes à faire une croix sur leurs envies d'enfant. Résultat : il y a désormais plus de décès que de naissances en France."
Les journalistes liraient-ils le Blog des tire-bouchons ???
-/-
Notons tout d'abord que nous n'avons rien de nouveau sur les nourrissons emmaillotés de type Delaporte.
Concernant ceux de type Gagnepain, nous notons des points communs :
- ils semblent tous sortir de la même matrice et
- ils tiennent tous un hochet dans la main gauche.
Des différences cependant :
- dans les métaux utilisés : si la plupart sont en bronze creux, certains sont en alliage d'aluminium,
- la matrice a pu être utilisée pour d'autres objets que les tire-bouchons, comme des percettes ou des étuis à allumettes avec grattoirs pyrogènes, y compris publicitaires,
- surtout, les mèches proviennent manifestement d'ateliers différents.
Tout ceci confirme en creux que ces tire-bouchons sont des assemblages plutôt que des créations complètement réalisées ex nihilo par des fabricants.
-/-
Bernard Devynck nous rappelle qu'Alain Grondeau et Jean-Pierre Lamy étaient les auteurs d'un dossier "Les tire-bouchons en aluminium & alliage d'aluminium" publié dans le Cahier de L'Extracteur n° 88 et qu'ils y présentaient un nourrisson emmailloté :
Légende : "Les nourrissons emmaillotés ont été réalisés par Gagnepain, Haillus et certainement Guinot, le plus souvent en bronze. Celui-ci en alliage léger est beaucoup plus rare."
Alain Grondeau, contacté ce jour, estime que des échanges nombreux ont dû exister entre les artisans qui faisaient des mèches et ceux qui faisaient ce type de poignées. Il ajoute qu'une jolie statuette en bronze trouvée en brocante peut toujours être détournée en poignée de tire-bouchon.De son côté, Gérard Bidault, dans son livre Les tire-bouchons français - Modèles et Fabricants, évoquait déjà L. Haillus comme créateur de ce type de tire-bouchons, nous y reviendrons.
-/-
Vos contributions
- C'est Norman Wright qui a réagi le premier : son exemplaire a une mèche de section carrée et est marqué Gagnepain :
- Luc Bille a suivi en nous faisant parvenir les photos des deux pièces de sa collection :
Et Luc d'ajouter "Après les bébés on pourrait faire un article sur le belge le plus célèbre après Eddy... Le Manneken Pis !"
Il est vrai que ce célèbre personnage bruxellois a inspiré des fabricants de tire-bouchons comme Volynkine, mais aussi et surtout des fabricants de souvenirs !
- Patrick Bordat n'a pas été en reste, voici ses photos :
- J'avais déjà présenté les poupons emmaillotés de Simon Znaty :
Voilà, nous avons un bel échantillon de cette production originale, mais nous ne savons pas qui est le père !
-/-
Il ne me restait plus qu'à travailler ! Pffhhh !
Un petit scoop tout d'abord qui en surprendra plus d'un :
Haillus n'est pas le père de ces nourrissons emmaillotés, tout simplement parce que Haillus n'est pas un homme, mais une femme, ... alors, la mère peut-être ?
Elle s'appelait "Demoiselle Lucie Haillus" et épouserait bientôt Gaston Bonnet.
Concernant la fabrication, je ne suis pas de la partie, mais voici ce que j'ai pu trouver :
L'estampage industriel consiste à déformer plastiquement un objet métallique (sans revenir à la forme d'origine) grâce à une "matrice" installée sur une presse hydraulique, mécanique, à vis ou un marteau-pilon. Ce procédé de forgeage à chaud peut se faire en plusieurs opérations, dont les premières sont appelées "ébauche", et la dernière "finition".
La fabrication est un travail d'équipe associant les dessinateurs qui créent les modèles, les fondeurs, les mécaniciens, les décolleteurs, les repousseurs et les ciseleurs.
Nous savons grâce aux recherches de Gérard Bidault (ouvrage déjà cité) que "Le premier janvier 1892, Jean-Etienne Gagnepain s'installe au 4 rue Pihet, dans le XIe arrondissement. Cette adresse restera celle de ses successeurs jusqu'à l'extinction de cette marque en 1982. Il y reprend l'atelier de Guetté, un ancien repousseur sur métaux."
-/-
Gagnepain, Bauer, Burgun, Haillus, Magot & Castella
Des recherches complémentaires, mais qui restent fragmentaires, me permettent d'éclairer un peu la situation.
Gagnepain fabriquait certainement ses mèches et les montait sur des poignées achetées aux artisans repousseurs comme Guetté :
1892 : Gagnepain, mécanicien constructeur, reprend l'atelier de Guetté, 4 rue Pihet... à quelques mois seulement de son propre décès.
1895 : La veuve Gagnepain le cède à Martin Bauer, tourneur sur métaux, qui associe les deux signatures Bauer-Gagnepain à sa production. Martin Bauer décède avant 1900.
1900 : La veuve Bauer prend le relais pendant trois ans puis cesse son activité en 1905.
1906 : Elle cède l'entreprise à Henri Numance Burgun (et non Numana, comme peut le laisser croire un acte d'état-civil), dessinateur industriel, puis mécanicien.
1909-1913 : Henri Burgun, successeur de Bauer et de Gagnepain, exerce à la même adresse.
1913 : Burgun vend l'entreprise à Demoiselle "L. Haillus". Traduisons : Lucie Haillus, future épouse Gaston Bonnet (en instance de divorce). Lucie Haillus acquiert le droit au bail de l'atelier de la rue Pihet auprès d'un nommé Charles (certainement le propriétaire des lieux). L'annonce indique que les éventuelles oppositions seront reçues chez Bonnet, 14 rue Beauregard.
1913 : Achat du droit au bail du 4 rue Pihet par Lucie Haillus
Bonnet était probablement associé de fait à la Demoiselle Haillus. On le retrouvera en tout cas en mars 1941 : le couple Bonnet revend alors l'entreprise à Henri Magot & Fernand Castella. Henri Magot est mécanicien, contremaître décolleteur, et Fernand Castella est dessinateur industriel.
1941 : vente de l'entreprise à Magot & Castella
1951 : augmentation de capital.
1962 : décès d'Henri Magot.
Gérard Bidault ne dit guère de bien des fabrications de cette dernière époque, mais l'entreprise continue de produire, notamment des pièces pour l'automobile et l'aviation... nos poupons emmaillotés type Gagnepain sont bien loin !
1980 : Liquidation de Magot & Castella.
-/-
Nous en resterons là, sauf éclairage complémentaire, en espérant pouvoir un jour évoquer les autres fabricants ou assembleurs : les Delaporte, Guinot, Langlois !
M