mardi 29 décembre 2015

AUGUSTE BAIN ET AYMÉ BINET : DES INVENTEURS DE TIRE-BOUCHONS REPÉRÉS À LA FOIRE AUX VIEUX PAPIERS DE NAMUR ?





Amis collectionneurs, bonjour !


Pas la forme ce samedi 26 décembre...

mais traverser la Belgique un lendemain de Noël, 
voir partout annoncée une foire du livre et du vieux papier de collection à NAMUR,
quand on a un fils bibliophile... 
comment ne pas s'arrêter ?





Les vieux papiers attirent un public qui leur ressemble : 
des gens aussi jeunes que les autres mais depuis un peu plus longtemps !



Namur, 26 décembre 2015.


Chiner sur ces foires aux livres et aux vieux papiers impose un rythme irrégulier et lent, très différent de celui qui est le nôtre en brocante. 
Les stands sont souvent spécialisés : régionalisme, livre ancien, histoire, ésotérisme, cuisine, "beaux livres", BD, cartes postales, documents commerciaux et publicitaires... de sorte qu'on peut négliger les uns pour s'attarder dans les autres.
Il faut alors y compulser un maximum d'objets, documents ou livres. Il faut aussi y parler, interroger chaque vendeur, pas trop précisément cependant : une focalisation excessive est souvent cause de forte inflation quand le vendeur a ce que vous recherchez !
Demandez plutôt le prix d'un objet voisin, négociez le, avant d'en venir à votre vraie cible.
Les vendeurs sont gens passionnés et aiment partager leur savoir. Prenez le temps de les écouter !

Et puis, faites-vous plaisir : les vieux papiers révèlent de belles surprises. On peut y rencontrer au détour d'une page de singuliers personnages depuis longtemps disparus mais ayant eu leur heure de gloire, des êtres inoubliables mais aujourd'hui oubliés...

La foire de Namur n'échappe pas à ces règles.

Mon épouse s'est intéressée aux stands de cartes postales anciennes. De mon côté, j'ai cherché et trouvé parmi les livres anciens un possible cadeau à faire à notre bibliophile de fils. 




Documentation pour bibliophile.


Satisfait, j'ai encore pris le temps de fouiller parmi les stands de vieux papiers, en quête de correspondances commerciales ou de publicités sur les tire-bouchons.

Et là justement m'attendait l'improbable rencontre !


-/-


Ce qui semblait être un recto-verso sous chemise plastifiée émanait d'une coutellerie parisienne : Auguste Bain à Paris.



Des tire-bouchons et bien d'autres choses...


On y trouvait notamment des tire-bouchons marqués A. BINET, mais aussi une pince parisienne, des ciseaux à raisin, une cueilleuse parisienne, des couteaux serpettes, greffoirs, mâcheurs ou à jambon, un coupe-œuf, une cuillère à jus, un masticateur de table... autant de merveilles, souvent marquées A. BINET, parfois A. BAIN, qui suffirent à déclencher l'achat !

Et le meilleur restait à venir.


Le recto-verso était en fait un dépliant de huit pages :



Catalogue Auguste Bain / Aymé Binet, 1908 - 1909


Il s'agissait d'un périodique faisant la promotion et donnant les tarifs des articles brevetés par Auguste Bain, périodique intitulé "L'Avenir de la Coutellerie", n° 29, 30° année, 1908 - 1909, très pompeusement attribué à la :

MAISON DES INVENTIONS NOUVELLES ET DU RASOIR MÉCANIQUE
AUGUSTE BAIN, Inventeur-fabricant [...]
A. BINET, Gendre et Successeur
2, rue Taitbout à Paris.

Mon inventaire se chargeait maintenant de matériel pour coiffeurs : tondeuses Dalila, rasoirs coupe-chou Eclair et rasoirs à lame interchangeable, démêloirs, fers à friser ou à onduler, mais aussi canifs, trousse et harpe multioutils...

Une riche documentation donc, mais aussi des informations intéressantes autorisant une recherche sur Auguste Bain, coutelier parisien ayant marqué des tire-bouchons...


-/-



La ville de Bois-Colombes où il résidait lui a consacré une exposition en 2015. Une plaquette la retrace et est accessible sur http://www.bois-colombes.com/
C'est à cette plaquette que j'emprunte les éléments biographiques qui suivent.

Auguste Pierre Bain (1856 - 1916) est un "inventeur - fabricant" de génie, d'un génie parfois jugé ostensible par ses concitoyens, et dont le drame fut la disparition de son fils Robert en 1905.

La plaquette d'exposition nous apprend qu'Auguste Pierre Bain est né à Vinay en Isère, le 13 octobre 1856, dans une famille modeste. 
Intelligent et ambitieux, il décide de se rendre à Paris pour faire fortune. La chance lui sourit et dès 1878, à l'âge de 22 ans, il fonde la "Maison des inventions nouvelles", commerce de coutellerie en tous genres, rue Taitbout, à Paris. 
Auguste Bain a sa propre manufacture au 24, rue du Faubourg du Temple et dépose pas moins de 19 brevets d’invention.

Le service de documentation de Bois-Colombes ne fait cependant pas état de brevets pour des tire-bouchons et nous n'avons non plus trace d'un brevet au nom d'Auguste Bain, ni d'ailleurs à celui d'Aymé Binet. 

Les brevets listés par les documentalistes forment un étonnant "inventaire à la Prévert" : 
- le rasoir mécanique (1880), 
- la "tondeuse humaine", tondeuse de coiffeur (1885), 
- la machine à aiguiser, repasser et affiler (1894), 
- le relève pantalon mécaniquedispositif empêchant le bas du pantalon d'être sali par la boue (1881), 
- le coupe-œuf (1902), 
- la pince de suspension,  dispositif de relevage d'une jupe de femme sur le côté (1902), 
- le pneu pare-boue pour voiture (non daté), 
- le "Protector Robert", pare-choc sur pistons (1905)...



Le rasoir mécanique A.B. breveté, à palette et lames interchangeables,
contribua largement à la fortune d'Auguste Bain


C'est une période faste où tout réussit à Auguste Bain : il est tout à la fois un industriel renommé et aisé, un esprit créatif reconnu et un notable incontournable de la ville.
Mais le décès en 1904 de son fils Robert, alors âgé de 13 ans, marque une rupture et la fin d'une période très créative. 

La découverte lors de travaux en 2004 du "trésor de l’avenue Robert-Bain" témoigne du drame.
La famille - probablement le père - avait fait sceller en 1909, dans l’un des piliers du portail de l’avenue dédiée à leur enfant défunt, une ampoule de verre contenant divers documents : faire-part de décès du jeune Robert, manuscrit d'une donation Robert Bain (bourses de voyage au profit d'élèves méritants), publicités Bain, et même un rasoir Auguste Bain...

Auguste Bain et son épouse Cœlina ont 48 ans lors de la perte de leur fils. 
L'activité de leur entreprise se poursuit cependant jusqu'en 1916, année du décès d'Auguste.
Ismaël Aimé Binetépoux de Juliette, l’aînée des filles Bain, progressivement associé, prend alors les rênes de l’entreprise, entreprise qui restera active jusqu'à la fin des années 60.


On ne sait rien d'Aimé Binet, si ce n'est que son nom, comme aussi celui d'Auguste Bain, apparaît sur plusieurs articles du catalogue.
La "pince parisienne" et un tire-bouchon à roulement à billes sont ainsi représentés avec un marquage A. BINET :




Deux tire-bouchons marqués A. BINET


La harpe multioutil, dite "petit nécessaire de voyage", est elle représentée avec un marquage A. BAIN :



Harpe multioutil marquée A. BAIN


Auguste Bain et son gendre se disaient "Inventeurs-fabricants" mais à en juger par ce catalogue ils apposaient leur marque commerciale sur nombre d'objets manifestement fabriqués par d'autres.



Reste à savoir si ces objets, effectivement marqués, ont réellement circulé ?
Peut-être pouvez-vous répondre ? 

Merci en tout cas de nous dire si vous possédez dans votre collection des tire-bouchons marqués A. BAIN ou A. BINET.


Quant à moi, je crois que je vais passer plus de temps dans les foires aux vieux papiers !



M










2 commentaires:

  1. Commentaire transmis par Patrice Husson : Mon frère m'avait trouvé il y a longtemps une page de revue avec une publicité pour une pince parisienne Bain. Cette publicité est parue dans l'Extracteur N° 32, assortie d'un commentaire de Gérard Bidault.

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  2. Merci Patrice. Effectivement, nous avons donc deux "pinces parisiennes" commercialisées par Auguste Bain. Elles sont légèrement différentes (emplacements doigts). Mais je partage l'avis de Gérard : Bain ne devait pas en être le fabricant, il les importait vraisemblablement d'Allemagne où un modèle avait été déposé par Thill et Küll in Solingen le 19.01.1893 sous le n° 10985. Mais nous ne savons pas encore si ces modèles ont été effectivement commercialisés avec un marquage, qu'il s'agisse d'A. BAIN ou d'A. BINET. Espérons que quelqu'un "sorte" un exemplaire marqué !

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