Amis lecteurs, bonjour !
Tim, lecteur gallois, nous avait proposé une énigme, à propos de
l'utilisation des jetons de champagne,
Cf. ENIGMA N° 25. :
Voici le point sur l'enquête menée avec notre "brigade de lecteurs".
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01. Les contributions apportées :
01.1. Joe Paradi, hélixophile et auteur apprécié, m'a rappelé que des jetons, tels que ceux de l'énigme, figuraient dans le livre qu'il avait co-écrit avec Don Bull :
"We had included many such tokens in the "Wine Antiques & Collectibles" Book. These were like coins, not the cork tops. Since they are drilled, crudely, the two coins/tokens you have were probably used for wine racks. Unfortunately, I do not know what the "Système C.B.F." means."
Cet ouvrage a été présenté ici, cf. ma fiche bibliographique :
01.2. Benoît Tassin, viticulteur de champagne et fondateur d'un musée de la bouteille, m'a apporté une précision sur le moment de la pose des jetons de champagne :
"Je ne voudrais pas vous induire en erreur, n'ayant que peu de données sur ces jetons, mais je vais essayer de me renseigner.
Je pense qu'ils n'étaient ajoutés qu'à la commercialisation, car sur toutes les bouteilles que j'ai pu voir dans les collections maisons, pleines et bouchées, (mais non habillées), cet attribut n'apparaît pas."
A propos de Benoit Tassin et de son musée de la bouteille, cf. :
01.3. Marc Poncelet, hélixophile, ancien président du CFTB, m'a fait faire une autre partie du chemin :
"Ces jetons peuvent être trouvés, sans être communs toutefois. Je confirme que c’est une aide pour tourner le muselet sur lui-même. Je te mets en photos jointes le même principe, mais personnalisé par un fusil ! Par contre aucun exemplaire de ce fusil n’existe à ma connaissance.
Le procédé date des années 1870-1880, j’ai un carton qui l’évoque, sans apporter la solution du sigle C.B.F. qui doit être celui du fabricant."
Carton publicitaire pour le Champagne Fisse Thirion
"Débouchage instantané par le fusil adhérent"
(Document Marc Poncelet).
Marc m'a fait parvenir un second message, auquel il a joint la photo d'un carton publicitaire pour le champagne Théophile Roederer (maison active de 1864 à 1909) où nous retrouvons notre jeton ou un sceau plombé équivalent :
"Cf. cette photo d’un carton que je possède, et qui reprend le jeton Théophile Roederer cité dans ton article"
Champagne Théophile Roederer se débouchant sans crochet
grâce au cachet plombé breveté S.G.D.G.
(Document Marc Poncelet).
01.4. Donnons aussi ici la réponse apportée par la maison Louis Roederer - et non Théophile Roederer - à un membre du forum "Détection passion"
http://www.echange-passion.
... lequel l'interrogeait sur un jeton Théophile Roederer (cf. image plus loin) :
"Nous pensons qu'il s'agit d'un "sceau" qui était apposé sur le muselet (soit en ficelle ou en métal) pour assurer l'authenticité de la marque.
Champagne Louis Roederer en a fait de même. Cela doit dater de la fin du 19ème siècle, début 20ème siècle.
Pour votre information, à la fin du XIXème, Théophile Roederer était une marque concurrente que Louis Roederer a rachetée en 1909."
... On sent la difficulté à répondre un siècle après sur la pratique d'une marque homonyme, concurrente, absorbée et de toute façon disparue !
01.5. Patrice Husson, hélixophile, vice-président du Club français du Tire-Bouchon, m'a apporté une autre contribution intéressante :
- Outre la photographie d'un jeton pour le champagne Minet (cf. plus loin), Patrice m'a adressé :
- un chromo publicitaire montrant les "drôles de plaques bombées" (calottes ?) placées sur les bouteilles de champagne Minet :
Champagne Minet, avec calotte bombée et muselet
(Document Patrice Husson).
Champagne Minet, bouteille à ouverture instantanée :
Pas de jeton, mais un système de tirettes
(Document Patrice Husson).
02. Conclusions provisoires :
Ces différents témoignages éclairent mais ne résolvent pas complètement notre énigme : nous n'avons pas déchiffré l'abréviation "C.B.F." ou "Charles B.F." et nous n'avons pas de document illustrant le positionnement des jetons sur les muselets.
Les contributions reçues dressent par contre le tableau des tentatives conduites par les maisons de champagne à la fin du XIX° siècle pour offrir à la fois une fermeture hermétique des bouteilles (les maisons ont la hantise du "recoulage") et leur ouverture sans l'aide d'un ustensile.
Toutes ces maisons œuvrent alors dans le même sens : doter le muselet d'un système sûr et d'ouverture facile.
C'est donc en fait à une étape dans l'évolution du bouchage des bouteilles de champagne que nous a convié Tim en nous interrogeant sur les jetons de champagne :
la transition entre ficelage et muselage moderne.
Bouchon de champagne ficelé à la ficelle et au fil de fer :
tortillon apparent, liège entamé par le fil.
Durant cette période qui couvre la seconde moitié du XIX° siècle, le ficelage à la ficelle et au fil de fer est progressivement renforcé par la mise en place d'une capsule bombée percée (cf. illustration Champagne Minet ci-dessus) ou à encoches entre bouchon et liens (brevet Jacquesson, 1844).
Capsule à quatre encoches (brevet Jacquesson, 1844)
Le bouchon est maintenu par une capsule ou une calotte et un fil de fer torsadé (l'usage de la ficelle disparaît), ou par une agrafe métallique plate.
L'agrafe reste cependant fréquente jusqu'en 1920 au moins.
Quart de champagne bouché à l'agrafe
(fin XIX°-début XX° siècle).
A l'initiative de ces maisons, les muselets commencent à être munis d'un dispositif de débouchage : le tortillon de fil est, soit scellé à l'étain, soit muni d'un jeton - ou d'un fusil gadget (Cf. plus haut, document Champagne Fisse Thirion) - avant que ne s'impose la boucle.
Le jeton, choisi par différentes maisons, est attaché d'une manière ou d'une autre au tortillon du muselet. Il sert à détorsader le fil de fer, mais est aussi un support de publicité.
On peut dénombrer au moins quatre types de jetons de champagne en fonction de leur mode de fixation au tortillon : percés, avec bélière, munis d'une patte de fixation, ou de deux pattes de fixation :
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03. Ultimes contributions :
03.1. Depuis que j'ai écrit ces lignes, Tim lui-même m'a proposé une possible identification du sigle C.B.F. ou Ch.B.F. : selon un membre du forum de collectionneurs auquel il est inscrit :
http://www.worldofcoins.eu/
C.B.F. ou Ch.B.F. correspondrait à "Charles-Benoit Fils",
"CHARLES BENOIT, fils, Champagne Wine-grower and Merchant, Delegate of the City of Rheims, and Member of the Bordeaux Wine Jury, 1882".
Je n'ai pas réussi à conforter cette hypothèse en retrouvant un brevet de Charles-Benoit pour un tel système !
03.2. Une dernière information nous est venue de Jean-François Muller, dirigeant de l'Association des Collectionneurs de Jetons-Monnaie ou ACJM.
Il s'agit d'un article de Michel Paynat, collectionneur cité dans mon précédent article, dont voici l'extrait qui nous intéresse :
Bulletin de l'ACJM :
Michel Paynat y confirme le rôle des jetons ou médaillettes publicitaires.
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Alors finalement, et même si le sujet reste ouvert, quelle réponse apporter à notre lecteur, Tim ?
Les jetons ont constitué une alternative à l'utilisation des pinces à champagne, crochets et autres coupe-muselets.
Quelques coupe-muselets publicitaires.
Ils ont disparu avec la généralisation du muselet à "boucle de débouchage" ou "œillet".
Mais ... nous n'avons toujours pas d'explication certaine sur "C.B.F.", ni d'illustration montrant un jeton en place sur le muselet !
La question reste donc ouverte et vos contributions seront les bienvenues.
M
Excellente recherche. Très intéressant. Merci beaucoup.
RépondreSupprimerMerci Tim. J'ai eu plaisir à faire ce travail avec toi et les amis hélixophiles !
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