mardi 17 mai 2016

LA CUISINIÈRE DE LA CAMPAGNE CONNAISSAIT DE BEAUX TIRE-BOUCHONS EN 1866




Amis gastronomes et néanmoins hélixophiles, bonjour !


Nos recherches nous entraînent parfois dans de savantes lectures, mais le hasard fait parfois les choses simplement aussi...

J'ai chiné ce matin, pour un Euro symbolique, un vieux livre de cuisine où j'espérais retrouver simplement quelque recette ancienne d'omelette aux asperges ou de pain perdu et me rapprocher ainsi des secrets de mes grand-mères depuis trop longtemps disparues...


Mes grand-mères, Alice et Marie-Louise, étaient nées en 1898, mais ce livre est de 1866 !

Et il s'agit déjà de la quarante-cinquième édition - la première édition est parue en 1818 - de :
LA CUISINIERE DE LA CAMPAGNE 
ET DE LA VILLE,
OU NOUVELLE CUISINE ECONOMIQUE
par M.L.E. AUDIOT,

En l'achetant, le tire-bouchon mes préoccupations étaient plus culinaires qu'hélixophiles, on le voit ! Et pourtant...


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Le livre s'ouvre sur les "ustensiles et appareils" nécessaires à la ménagère. 
Et c'est là, page 44, que m'attendait - après l'égouttoir et le casier, le panier à vin et le panier à bouteilles, le dégoudronnoir et la pince à champagne - un premier tire-bouchon, anglais comme il se doit :



Page 44, un premier tire-bouchon, anglais :
"Tirez les premiers, Messieurs les Anglais"
(Capitaine Hay, Bataille de Fontenoy, selon Voltaire)


Comment ne pas reconnaître là le célèbre King's Screw ?


Dowler Patent Ne plus Ultra
(photo Ferd Peters)


Création de Dowler au début du XIX° siècle, ce très beau tire-bouchon à crémaillère en os, marqué DOWLER PATENT NE PLUS ULTRA, n'a pas été breveté, ainsi que le rappelle Ferd Peters dans son ouvrage de référence Mechanical Corkscrews. 
Pour mémoire, le livre de Ferd Peters a été présenté ici dans ma fiche bibliographique :

Je pense que pour mieux apprécier la diffusion de ce tire-bouchon il faudrait trouver l'édition du livre de cuisine où il apparaît pour la première fois. 
Peut-être l'un(e) de vous possède-t-il une édition plus ancienne ?


Voilà pour le Dowler, mais en bas de page, le livre proposait aussi d'autres tire-bouchons...
J'en oubliai les recettes de mes grand-mères pour aller directement à la page 607 !


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Je me retrouvais au cœur d'un chapitre intitulé "Des Vins et des soins qu'ils exigent", dans lequel l'auteur présentait en vrac : les caves, les contenances des fûts, le collage des vins, le rinçage et l'entretien des tonneaux vides, la mise en bouteilles et le bouchage des vins... avant d'évoquer leur service et leur emploi.
Et c'est dans cette dernière partie, page 607, qu'étaient présentés deux autres tire-bouchons :



Page 607, Dordet et Lesieur.


Le premier est incontestablement "le tire-bouchon à levier de M. Dordet, coutelier, 9 rue des Fossés - Montmartre" (Montmartre et non Paris : Montmartre était encore une commune indépendante, et n'a été intégrée dans Paris qu'en 1860). 



Pince Dordet,
in Gérard Bidault, Les tire-bouchons français.

Le dessin est conforme en tous points au modèle présenté par Gérard Bidault dans son livre Les Tire-bouchons français (encore une fiche à faire !).


Le second tire-bouchon est décrit comme suit : "celui de M. Lelieur, rue du puits, n° 8, (aujourd'hui rue Aubriot Paris 4°), est muni, à la naissance de la tige, d'une crémaillère qui force le bouchon le plus serré à tourner dans le goulot de la bouteille...".
Une recherche sur Lelieur m'a permis de le retrouver établi comme coutelier à Paris, et apprécié pour son travail du maillechort au point d'obtenir une "mention honorable" à l'Exposition des produits de l'industrie française en 1844.

Mais ma recherche m'a aussi ramené vers les livres de Gérard Bidault !
Je l'avais oublié, mais celui à qui rien n'échappe avait repéré mon livre de cuisine des années avant moi, et dans une édition de 1861 ! Du coup Lelieur et son tire-bouchon figuraient dans le premier livre de Gérard Bidault : Les Fabriques Françaises de Tire-bouchons ! 
Ce livre là par contre, je vous l'avais présenté, cf. ma fiche :

C'est donc aussi à Gérard Bidault que nous devons cette seconde illustration :


Tire-bouchon Lelieur
in Gérard Bidault Les Fabriques Françaises de Tire-bouchons


Faute de disposer de plus de documentation, particulièrement sur la dite "crémaillère" - simple disque cranté ou dispositif d'embrayage ? - il est impossible d'affirmer que Lelieur était le fabricant de ce tire-bouchon inspiré du brevet Henshall et manifestement très "british". 
Peut-être Lelieur importait-il seulement des tire-bouchons anglais qu'il proposait à ses clients ?


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Page 377 : recette du Pain perdu.
Faites bouillir un quart de litre de lait et réduire à moitié avec un peu de sucre, une pincée de sel, une demi-cuillerée d'eau de fleur d'oranger, une pincée de zeste de citron ; ayez des mies de pain coupées de la grandeur d'une pièce de 5 francs et beaucoup plus épaisses,mettez-les dans le lait pour les faire tremper un petit moment ; quand elles seront toutes imbibées, mettez-les égoutter, trempez dans l’œuf battu, et faire frire ; servez-les saupoudrées de sucre.



"Tout fait ventre", dit-on !





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