mercredi 7 octobre 2015

RENCONTRE AVEC ARMANDO ET MARIANGELA, COLLECTIONNEURS ITALIENS





Amis hélixophiles, bonjour !



Je l'avais évoqué naguère : mon épouse et moi avons fait de belles rencontres en Italie !

Et parmi celles là, la rencontre avec Armando Cecconi et son épouse Mariangela était forcément la première que je me devais d'accomplir.

En effet, alors que je recherchais de la documentation sur la production de tire-bouchons en Italie, Hajo Türler m'avait suggéré de me mettre en relation avec Armando, éminent collectionneur turinois. Et de fait Armando avait fait tout son possible pour me venir en aide, avec la compétence et la courtoisie qui le caractérisent.


Armando Cecconi était alors secrétaire de l'Associazione Italiana Collezzionisti Cavatappi et coauteur d'ouvrages indispensables sur le sujet. 
Cf. mes deux fiches bibliographiques :


J'avoue donc volontiers avoir placé Turin en première étape obligée de notre périple italien. L'exposition universelle de Milan et la visite de Rome attendraient !

Notre rendez-vous fut pris avant les vendanges, particulièrement précoces cette année. 
Ces circonstances étaient contingentes : Armando pouvait tout faire, sauf manquer la vinification !

Armando m'écrivait le 10 septembre :
"Je suis à Mondovì maintenant pour faire le vin; cette année la vendange s'est faite très tôt.
Aujourd’hui arrivent les raisins.
La fin du travail n’est pas possible à prévoir, parce qu'elle est fonction de la gradation du sucre et de l’alcool ; je pense que sera le 20 environ.
Si la fin du travail ne se fait pas le même jour que ton passage à Torino, pas de problèmes, nous pourrons nous rencontrer à Torino. 
Autrement tu peux venir à Mondovì ? Tu verras mon travail et mes outils (tous en bois !)."

Puis le 14 :
"Je suis en plein travail !Hier j’ai fait la “pigiatura” c’est à dire que j'ai pressé les raisins pour obtenir le liquide, le “mosto”.
Maintenant va commencer la fermentation, c’est à dire la transformation des sucres en alcool.Elle finira vers le 20 ou le 22 environ; il est difficile de le prévoir ; je dois suivre le diagramme de gradation “Babo”: il faut arriver à 2 ; ci joint le diagramme de l’an passé."



Le diagramme de Babo, 2014.


Notre rencontre dépendrait donc du degré Babo du moût.


-/-


De fait la nature nous est venue en aide et nous avons pu nous retrouver à Turin.

Armando et Mariangela nous y avaient réservé une magnifique réception. 
Ingénieurs tous les deux et de formation classique, leur culture est plaisir et non ostentation. 
Leur maison est belle et accueillante. 
Le goût de collectionneuse et les talents de peintre de Mariangela s'y expriment généreusement et Armando en est parfois le héros !



Armando hélixophile par Mariangela.


Lui, de son côté, veille sagement à ne pas laisser sa collection envahir l'univers partagé. Les tire-bouchons sont certes là, tantôt discrets, tantôt éléments essentiels de décoration, souvent abrités dans le meuble qu'il a aménagé pour eux, tandis que les plus précieux sont en sécurité et hors de portée. 



L'armoire aux tire-bouchons aménagée par Armando.


Si Mariangela peint, Armando récite de la poésie et, pour notre plus grande joie, chante aussi : il nous a régalés du succès de Mistinguett, "Paris, c'est une blonde". 


Pour notre visite, le projet du couple était simple et implacable : dans le même temps qu'ils nous feraient monter en gamme dans la dégustation de leurs meilleurs vins, ils nous feraient aussi monter en gamme dans la "dégustation" de leurs meilleurs tire-bouchons.

Armando me fit d'abord apprécier toute la diversité de la production italienne : bosso, ottone e vite archimediene en sont les traits d'union.



Aperçu sur la diversité de la production italienne.


Massussi, Pietro Stella, Vogliotti, Berera, Bordoni, Cappelli sont quelques uns des noms qui comptent parmi les fabricants italiens. 
Mais la recherche des brevets reste difficile : les archives n'ont pas été étudiées et les documents ne sont pas numérisés.


-/-


Le parcours était complexe, mais Mariangela nous offrit bientôt de reprendre des forces. 
C'était le temps d'un délicieux "pranzo" : tortellini alla mantovana, involtini di vitello con piselli, formaggi, torte al cioccolato e pere... dolcetto d'Armando, caffe... nous étions devenus italiens !


La conversation amicale nous permit de mieux faire connaissance, d'oublier un temps notre passion au profit de l'échange le plus large.
Mais nous n'oubliâmes pas d'évoquer aussi nos recherches hélixophiles. 
Nous nous intéressions l'un et l'autre à l'apparition des mots, "tire-bouchon" ou "cavatappi", dans nos langues respectives.
Armando me parla des occurrences repérées dans les comédies de Carlo Goldoni au milieu du XVIII° siècle, textes dont il n'oublia pas de me donner copie.

Il évoqua aussi le terme utilisé dans le dialecte vénitien de l'auteur : "tirabusson", terme révélant l'origine française de l'ustensile.

Il faudra que je vous en reparle.


-/-


Après le repas vinrent les plus belles pièces.
Armando a une collection remarquable d'organisation, d'ordre et de qualité.

Parmi les pièces qu'il aime, ces tire-bouchons allemands ne doivent pas faire oublier les plus rares tire-bouchons anglo-saxons :



Celluloïd allemands.


Après la présentation de tire-bouchons techniques, suivit celle de modèles précieux.

Et puis Armando nous présenta celui qui est peut-être l'un des deux plus anciens tire-bouchons jamais trouvés, sorti de la Tamise et antérieur à 1680, il semble avoir été muni d'une mèche archimédienne et d'un bouton préfigurant d'un siècle le brevet Henshall ; y est jointe l'attestation d'authenticité fournie le 30 septembre 1982 par Homer D. Babbidge Jr, président du Hartford Graduate Center.



O'Rourke corkscrew


Armando posséderait ainsi un proto-tire-bouchon en plus de son tire-bouchon Proton ?



Proto tire-bouchon et tire-bouchon Proton ?



Mais Mariangela n'est pas de reste : elle a aussi de très belles trouvailles à son actif.



Trouvaille de Mariangela : 
un nécessaire de voyage vénitien, incluant un tire-bouchon


Bouquet final du feu d'artifice et trouvé par elle, ce nécessaire de voyage en argent est datable par les poinçons qui l'ornent : il remonte à la République de Venise, soit au plus tard en 1797 !


Vous l'aurez compris, je ne vous ai montré là qu'un faible échantillon de la collection d'Armando et Mariangela. Mais les rencontres valent plus par la qualité des personnes que par la présentation d'un inventaire.


-/-


Enfin, Armando avait gardé une belle idée pour la fin de notre journée.
Il nous ferait découvrir le magnifique vignoble de Barolo et le Museo dei Cavatappi de Paolo Annoni (ce sera l'objet d'un autre article), avant de nous conduire à Mondovi où lentement s'élaborait son propre dolcetto.



La production artisanale d'Armando.



Un homme comme celui-là ne peut pas être mauvais, n'est-ce-pas ?

Je suis heureux de pouvoir retrouver bientôt Armando et Mariangela aux congrès du Club Français des Tire-Bouchons.

Merci à tous les deux pour leur accueil.


M


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...