lundi 30 janvier 2023

CHINER, ET PAS SEULEMENT DES TIRE-BOUCHONS, EST UN PLAISIR SANS CESSE RENOUVELÉ !

 
Amis lecteurs-chineurs, bonjour !


J'aime à le partager avec vous :

CHINER, ET PAS SEULEMENT DES TIRE-BOUCHONS EST UN PLAISIR SANS CESSE RENOUVELÉ !


Pour tout dire, nous attendons avec impatience la reprise des brocantes et autres vide-greniers de village mais elle se fait attendre ! Seules manifestations d'importance, les Puces de Metz, rassemblements de professionnels et de particuliers au Parc des Expositions, se tiennent régulièrement, y compris en cette période hivernale, et méritent que je vous les présente, avant que je ne vous raconte notre dernière expédition ce samedi 28 janvier 2023.


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Les Puces de Metz


Une vingtaine de ces évènements est organisée chaque année, les samedis matins, à une fréquence irrégulière, les autres salons et expositions professionnelles primant. Il est donc sage de se renseigner sur le programme annuel avant d'entreprendre le déplacement.




Deux cents exposants professionnels et une centaine de particuliers déballent régulièrement dans deux grands halls. 



Puces de Metz : le deuxième hall


Ces déballages ont une organisation spécifique : les trois quarts de la surface sont dévolus aux professionnels, le quart restant accueille des particuliers.
Les tarifs sont de 12 € le mètre linéaire pour les particuliers (3 € le mètre linéaire pour les fripes) et de  85 € pour un stand de 6 m² pour les professionnels. Les vendeurs particuliers doivent donc être suffisamment motivés et achalandés pour s'acquitter du prix de ces places statutairement réservées. 
Le déroulement dans les halls a l'avantage de permettre l'exposition de marchandises fragiles.
Un bar permet de se poser, mais les chineurs s'accordent à trouver que les tarifs sont relativement élevés.
L'accès et le parking gratuits pour les visiteurs favorisent la plus large fréquentation : ce sont des centaines de chineurs, bien équipés, sac à dos et bourse pleine, qui se pressent à l'ouverture des portes, fixée à 7h.

Pour toutes ces raisons, les Puces de Metz sont des évènements de qualité aux dimensions interrégionales. Les exposants viennent du grand Est : Champagne, Lorraine et Alsace, mais aussi de Bourgogne ou des régions étrangères les plus proches : Wallonie belge, Luxembourg, Sarre allemande. 
La région étant très urbanisée, on est assuré de trouver tout... ce qu'on n'est pas venu chercher : livres anciens, peintures et sculptures, montres et bijoux, jeux et jouets, objets de curiosité, art populaire, plaques émaillées, enseignes, mannequins, fripes, fonds de magasins... ou de caves !
De nombreux stands proposent des productions artistiques lorraines : mobilier lorrain, cristal de Baccarat ou de Saint-Louis, faïences de Lunéville, Saint-Clément ou Sarreguemines, émaux de Longwy et bien sûr toutes les grandes signatures de l'Ecole de Nancy : Majorelle, Gallé, Daum, Lalique, Muller frères...
Le "militaria" est assez surreprésenté : la Lorraine a souvent été malgré elle le lieu de grandes batailles. On peut donc y voir des armes et des uniformes anciens, des équipements, des médailles... mais je dois avouer que "ce n'est pas mon truc" !


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Samedi dernier...


Je vous épargnerai aujourd'hui les nombreuses rencontres aussi bien que les gags involontaires : sac oublié sur un stand, confusions de personnes...
Je ne vous dirai pas mes efforts pour aider les amis en faisant semblant de savoir l'allemand ou l'italien...
Je ne vous raconterai pas non plus le casse-croûte entre copains : pâté lorrain, saucisson "lioner", terrine de chevreuil, munster, le tout arrosé de chardonnay et de pinot noir des côtes de Meuse... ou d'eau pour moi cette fois !
Non, je me limiterai à vous parler des objets trouvés et à partager avec vous mes réflexions.

Voici nos trouvailles :




Mon épouse a chiné une jolie boîte à ouvrage en bois noirci, époque Napoléon III, ainsi que deux petits vases qu'elle souhaite utiliser.
De mon côté, j'ai acheté une petite enclume de bijoutier-horloger et quelques outils de bourrelier que j'aurai plaisir à restaurer. J'y ai ajouté un objet insolite : un "moutardier automatique Argit" exposé dans sa boîte... comment aurais-je pu résister ?
J'ai apporté mon écot à un ami exposant en lui achetant des serre-livres éléphants, art déco, en mauvais état : beaucoup de travail en perspective, mais il paraît que l'éléphant dans une maison porte bonheur ?

Enfin et surtout, j'ai acheté quatre tire-bouchons.






- Le premier est un Pérille, époque Jacques Pérille. Il est bien marqué J-P dans sa roue dentée.

- Le deuxième est également un Pérille première époque et est marqué simplement J-P en haut de la poignée. La comparaison avec les trois autres exemplaires que je possède me surprend un peu :




L'exemplaire que je viens d'acheter est celui le plus à gauche et lui seul est marqué. On peut apercevoir des différences notables entre les quatre exemplaires : l'usinage de la poignée et les longueurs de mèches diffèrent nettement... autant de variantes qu'il faudrait pouvoir dater !

- Le troisième tire-bouchon acheté ce samedi a une poignée en corne sur laiton, la mèche est de type queue de cochon et l'axe est fuselé en quenouille.




Il est non marqué, mais je pense qu'il doit s'agir d'une fabrication des frères Delaporte.

- Ma dernière trouvaille me plait vraiment. Il s'agit d'un tire-bouchon à protège-mèche escamotable. Il n'est pas marqué, mais dérive du brevet obtenu par Louis Renard en 1880. La différence est qu'ici c'est le protège-mèche et non la mèche qui bascule. Les tire-bouchons à mèche protégée, dont celui-ci, ont été présentés dans l'Extracteur n° 85 de mars 2017. Un même modèle a également été trouvé avec une publicité "L. ROQUET SPIRITUEUX DIJON".



Tire-bouchon à protège-mèche escamotable


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Ca ne vous donne pas envie de venir chiner à Metz ? Si oui, n'oubliez pas de me contacter auparavant, j'aurais plaisir à vous y retrouver !
Mais bon, il faut que je vous quitte : l'électrolyse a assez duré, la restauration m'attend !



M




lundi 23 janvier 2023

PECQUET, PERILLE, BOILEAU : UN CATALOGUE ET UN TIRE-BOUCHON SURPRISE

 

Amis lecteurs, bonsoir !


C'est peut-être mon côté people, mais je reste impressionné par la saga des fabricants de tire-bouchons et de leurs descendants et/ou successeurs. Ce sont là dynasties, unions, séparations et successions... un feuilleton "royal" en somme !

Je vous propose une nouvelle fois de partir en exploration, avec comme véhicule :

PECQUET, PERILLE, BOILEAU : 
UN CATALOGUE ET UN TIRE-BOUCHON SURPRISE.


J'ai retrouvé dans mes vieux papiers un catalogue acheté il y a plusieurs années lors d'un Congrès du CFTB (mais à qui ??) : il s'agit d'un catalogue Boileau non daté, accompagné de tarifs illustrés de 1963. Je me suis penché dessus avec curiosité, notamment pour nourrir le livre que nous coécrivons, Jean-Pierre Lamy et moi sur les tire-bouchons à hélice.

C'est cette enquête que je me propose de vous raconter ce soir.


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Voici la page de couverture du catalogue :



Catalogue Boileau non daté
(Collection personnelle).



ainsi que les entêtes des tarifs de janvier et juillet 1963 :



Entête janvier 1963


Entête juillet 1963



D'un format 21,8 x 27 cm, le catalogue compte 12 pages imprimées en noir et blanc et présente les tire-bouchons, casse-noix, couteaux à conserves, articles pour services à découper, fusils, articles de ménage, articles de caves, anneaux de clés, articles divers et éperons proposés par la "Fabrique de quincaillerie fine nickelée A. BOILEAU". On y retrouve de nombreux objets estampillés A.P., pour Adolphe Pecquet.

Ce catalogue motive une première recherche pour retracer la saga de la Fabrique d'Amédée Boileau : les travaux de Gérard Bidault, son livre Les tire-bouchons français, modèles et fabricants particulièrement, nous y aideront grandement. Une autre source féconde sera https://www.geneanet.org/
Mais le catalogue suscite aussi notre intérêt pour un autre challenge : essayer de le dater.
Il sera temps ensuite de voir quelle surprise nous attendait dans ce catalogue et dans les tarifs 1963 qui lui étaient joints.


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La saga, de Trébutien à Boileau...


C'est en effet une curieuse saga qui nous ramène sans cesse à Amédée Boileau :
- Trébutien, Pecquet, Boileau...
- Burel, Stiel, Hurel, Baradat, Boileau...
- Pérille, ses fils, Georges Creuse, Boileau...
- Jules Bart, ses fils, Dubois et Crespeau, Boileau !

- La saga commence dans les années 1870, à Vienne-en-Arthies, dans le Vexin.
En 1875, Louis Eugène Trébutien (1832-1915) y installe sa manufacture d'acier poli au Moulin d'en Haut ou moulin neuf. Trébutien vivra jusqu'en 1915, mais à 51 ans, en 1883, il cède l'entreprise à Adolphe Aimable Henri Pecquet (1858-1940). 
Aussi inexplicablement, Pecquet, père d'un fils célibataire et de trois filles, cesse son activité en 1911 - alors qu'il n'est âgé que de 53 ans et vivra encore 29 ans - et vend la manufacture à Amédée Boileau (1882-1969).

- A proximité, le Moulin des Millonnets dit Moulin de Pierre ou moulin Villers, également à Vienne-en-Arthies, a été transformé en usine d'objets en acier poli (tire-bouchons et casse-noisettes), usine dirigée par une succession rapide de propriétaires. Parmi eux, les Burel sont à l'époque les plus grands fabricants, mais leurs ateliers principaux sont dans la Haute Marne.



Le Moulin des Millonnets ou Moulin de Pierre 
à Vienne-en-Arthies


L’un des ouvriers de l’usine, Mathias Stiel (1843-?), polisseur sur métaux, originaire de Lemberg (Moselle), prend la relève en 1883. Marié sans enfants, il vend son affaire en 1890 à Jules Clément Hurel.
Jules Clément Hurel (1838-1893) est installé en 1878 à Paris comme fabricant d'acier poli et de tire-bouchons. Très tôt devenu veuf, il se remarie avec Marie Victorine Didier, elle-même veuve d'un marchand de vins, Emile Bernard, dont elle a une fille, Juliette Elise Fernande Bernard. 
Juliette Elise Fernande  épouse Jean Pierre Raoul Baradat (1862-1929), salarié dans l'entreprise, et son repreneur au décès de Jules Clément Hurel. Baradat conserve le Moulin des Millonnets et y fabrique des tire-bouchons jusqu'à sa mort en 1929.
Après lui, son fils (non identifié) vend l'entreprise à Amédée Boileau  fin 1930, ne gardant qu'un magasin à Paris.

- Bénéficiant d'une réelle antériorité, le concurrent de Boileau est bien sûr Jacques Pérille (1837-1903), puis ses successeurs, sous les raisons sociales Les fils de J. Pérille (1903-1925), Georges Pierre Creuse (1925-1931), enfin Anciens Etablissements Pérille (1932-1937), jusqu'à l'acquisition du fonds par Amédée Boileau en 1938.

- Plus contemporain, il y a Marie Jules Léon Bart, dit Jules Bart (1893-1945), l'inventeur du ZIG-ZAG, auquel succèdent en 1945 sa veuve et ses fils. Les établissements Bart sont rachetés en 1959 par Dubois et Crespeau, déjà propriétaires de la société TIMECA. Ultérieurement, et sur les conseils de Roger Bart, fils cadet de Jules Bart, Dubois et Crespeau finissent par racheter l'usine Boileau de Cosne-sur-Loire pour former la société BOILEAU, ZIG-ZAG ET TIMECA REUNIS : Boileau et Bart se retrouvent ainsi associés en 1965, quatre ans avant la mort d'Amédée Boileau
Cette entreprise, devenue la société L'IDEAL en 1976, poursuit aujourd'hui encore son activité, notamment la fabrication des ZIG-ZAG !

Les acquisitions successives ont concentré entre les mains d'Amédée Boileau une très large part des des productions françaises de tire-bouchons !


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La datation du catalogue


La couverture est sobre avec un texte minimaliste qui nous ouvre cependant des pistes.
Les premiers renseignements nous sont donnés par la raison sociale :
Ancienne Maison A. PECQUET
A. BOILEAU
Cette raison sociale revendique la succession Pecquet, mais n’indique pas encore la mention « Acquéreurs des Ets J. PERILLE » (année 1938) que l’on trouve sur les entêtes de tarifs joints, plus tardifs (1963). Un examen attentif montre d'ailleurs qu'aucun modèle Pérille n'est présent dans le document.
En première approche, nous pouvons en déduire que le catalogue a été édité entre 1911 et 1938.

Le numéro de téléphone indiqué est ARCHIVES 56-42.
Cela correspond à la numérotation mise en place en 1912, et effective jusqu’en 1928, début de l’automatisation des Centraux téléphoniques. L’automatisation du Central parisien  ARCHIVES est achevée courant 1931. Nous pouvons donc resserrer notre fourchette à l'intervalle 1912 - 1931.
Notons aussi que les tarifs 1963 joints à notre catalogue comportent le numéro de téléphone ARChives 56-42 : c'est que depuis 1946 (et théoriquement jusqu'en 1955), la numérotation, composée directement sur le cadran rotatif des téléphones, est formée des trois premières lettres du nom du Central - mises en majuscules - suivies de quatre chiffres, ici ARC 56-42.

L’adresse indiquée, 8 rue Elzévir à Paris, est celle où Boileau s'est installé en 1914 (référence Gérard Bidault). La fourchette se resserre un peu plus à 1914 - 1931.
Et la production de l'Usine à Cosne (Nièvre), également indiquée, débute en novembre 1921. Notre intervalle se réduit encore : 1922 - 1931

Nous avons pu comparer les objets proposés avec ceux présents dans un autre catalogue Boileau, appartenant à Lionel Belhacène, daté de 1928 et accompagné des tarifs 1929. 
Selon Gérard Bidault, ce nouveau catalogue Boileau sorti en 1928, inclut "une vingtaine de modèles à manche bois […], une grande variété de poignées en buffle, corne ou galalithe, sans oublier tous les modèles à tête métal, fonte, cuivre, laiton et les ergonomiques dont le célèbre DEBOUCHOIR A.P. (déposé). Côté systèmes […] des hélices à deux ou trois branches, deux modèles à crémaillère, deux systèmes à cloche ressort [...] et l'ETINCELANT."



1928, un catalogue plus riche, accompagné des tarifs 1929
(Collection Lionel Belhacène).



Notre catalogue est également dense, mais ne propose ni le tire-bouchon extensible ECLAIR A.P., ni le  couteau à conserves RECORD. Le couteau à conserve SIMPLEX est présenté comme un « modèle nouveau », alors qu'il est référencé dans le catalogue 1928. De même, le bouchon-compteur IDEAL apparaitra également dans le catalogue 1928.
Notre document est donc légèrement antérieur à celui-là.

Nous daterons notre catalogue de la période 1921 - 1927, vers 1925 probablement.


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Une vraie surprise !


Mais l'objet de cet article tient surtout à une curieuse trouvaille.
Nous l'avons dit, notre catalogue était accompagné de tarifs illustrés de 1963.
Nous nous sommes attachés à comparer les tire-bouchons à hélice présents dans les catalogues 1925 (vers), 1928 et les tarifs 1963 ; en voici les extraits intéressants, je vous laisse les observer attentivement.



Catalogue, vers 1925



Catalogue 1928



Tarifs janvier 1963



Tarifs juillet 1963.



La surprise concerne l'évolution du tire-bouchon à hélice trois branches. 
Notons l'évolution de la poignée des deux premiers numérotés 2517 et marqués A.P. dans un ovale, ainsi que l'ajout d'une étiquette de garantie marquée "GARANTI A.P." sur le modèle 1928. 
Beaucoup plus étonnant, les exemplaires représentés dans les tarifs illustrés de 1963, référencés 80 (J.P.), sont présentés comme l'étaient les versions A.P., mais sont marqués J.P. dans un ovale et également munis d'une étiquette "GARANTI J.P. PARIS" ! Et ce n'est pas une erreur ou alors ce serait une erreur redondante puisque présente dans deux documents différents.




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Possédez-vous un exemplaire du tire-bouchon à hélice trois branches marqué J.P. dans un ovale ? 
Si tel est le cas, Jean-Pierre Lamy et moi serions très heureux si vous pouviez-nous en faire parvenir une photographie.



M


P.S. : J'intègre ici le commentaire apporté par Lionel Belhacène à la lecture de cet article :
"Pour ce qui est du marquage JP dans un ovale, je ne suis pas certain qu'il existe réellement. Les impressions se faisaient avec des tampons qui resservaient pour plusieurs catalogues, et les erreurs n'étaient pas corrigées (il y a pas mal de cas similaires dans les catalogues Pecquet). Bref, une erreur due au graphiste qui a repris l'ovale et mis JP dedans pour faire comme le AP, mais en pensant qu'il s'agissait de Pérille : c'est tout à fait plausible pour moi. Évidemment, sauf si on trouve ce TB dans une collection..."

jeudi 12 janvier 2023

LE CATALOGUE ROUX 1931 QUINCAILLERIE & OUTILLAGE... ET TIRE-BOUCHONS DE PERILLE !



Amis blogueurs, bonjour !


En ce début d'année, les brocantes et autres occasions de chiner ne sont pas nombreuses, même loin de notre septentrionale Lorraine.
Séjournant à Hyères (Var), nous ne pouvions négliger le déballage hebdomadaire des "Bonnes Puces Magic World" : la récolte a été aussi agréable que modeste :




- un insolite coffret d'électrothérapie de Charles Chardin, 
- une belle boîte de jeux années 60, production C. Michel, 
- un tire-bouchon à hélice Pérille au marquage CHAMB SYNDIC FRANCE QUINCAILLERIE, 
- un petit lot incluant un tire-bouchon harpe pliante, un fil à plomb et un sifflet de scout, 
- un vieux marteau de carrossier ou batte à planer MOB...

M'appuyant sur ces trouvailles, je pourrais évoquer la personnalité de Charles Chardin et sa méthode "d'électro-cinésique vasculaire" ou E.C.V., présentée par lui comme la panacée quasi-universelle permettant, nous dit Wikipédia, "la guérison de la paralysie et de l'épilepsie, le réparation des lésions musculaires, le traitement des états grippaux, des flatulences, de l'asthme, des fièvres, des règles douloureuses, des tumeurs, des cancers, de la gangrène, de l'anémie, de l'obésité, etc.", ou bien rechercher quelques éléments sur l'éditeur de jeux Michel à Chambéry, ou encore présenter MOB, fabricant français d'outillage à main depuis 1920...

Mais quel rapport avec le Blog des tire-bouchons, me diriez-vous ?
Alors tant pis, je vais laisser ça de côté et vous présenter un catalogue ancien acquis il y a peu :


LE CATALOGUE ROUX & Cie 1931
QUINCAILLERIE & OUTILLAGE




Un catalogue de 74 pages illustrées où l'on trouve des tire-bouchons Pérille !



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Evoquons tout d'abord l'histoire de l'entreprise :
Précisons d'emblée qu'elle n'a aucun rapport avec l'entreprise de Georges Roux, inventeur du débouchoir Ajoux breveté en 1919 et fondateur de la société Les Nouveautés Pratiques.
La Maison Roux revendique une fondation en 1859, mais il est difficile d'en retrouver la trace avant les années 1890. 
Elle est alors située à Paris, dans le XIe arrondissement, au 2 place de la République puis, vers 1893, au 54 boulevard du Temple, avant de déménager au 9 rue des Bluets vers 1910
C’est une entreprise familiale à la tête de laquelle se sont succédé des générations de Roux. L'aïeul Claude (1805-1854) était négociant en vins à Bercy ; il eut trois fils, dont Philippe (1834-1893), également négociant. Philippe était le père de Paul Louis (1864-1929), l'industriel qui nous occupe, et d'Albert Guillaume (1870-1914).
Au décès de Philippe, la raison sociale Ph. Roux & Cie devient Roux Frères & Cie, puis, vers 1909, Paul Roux & Cie. 
Le prénom disparaîtra, mais la raison sociale Roux & Cie sera ultérieurement conservée par les successeurs de Paul Roux.
C'est à cette époque que Paul Roux s'établit au 9 rue des Bluets, comme fabricant de machines et d’outillage, avant d’évoluer vers le commerce de gros en quincaillerie et outillage.
Nous ne trouvons plus trace de cette Maison dans les années 30 : a-t-elle survécu à la grande crise... le lecteur pourra peut-être nous renseigner ? 

Eh oui, les lecteurs sont précieux ! 
Voici la contribution de l'ami Jacky Corbel : 
"C’est maintenant l’hôpital mère-enfant
Avant cet hôpital, il y avait la maternité des Bluets. C’est là que je suis né en 1954…
Avant, c'était un dépôt de machines outils.
Ca situe la fermeture ou le déménagement de Paul Roux entre 1932 et 1937…"


L'inscription au dessus de la porte indique :
Précédemment au 54, Boulevard du Temple



Le logo : une roue de charron !


Le logo de Roux et Cie, hérité de ses débuts, est une étonnante roue de charron à moyeu et rayons en bois, cerclée de fer, et marquée « R » au niveau de son moyeu, un logo sûrement devenu désuet en 1931 !


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Examinons notre catalogue :

S'il est impossible d'attribuer sa conception ou sa réalisation à un imprimeur : aucune mention de ce type n'est présente, il présente un premier avantage : il est daté de 1931.
D'une manière surprenante en cette période de grande crise économique et d'inflation galopante, les prix de vente  sont indiqués ! 
Et paradoxalement un avertissement en première page indique une remise générale de 33,33 % : nous devons être en 1932 ou 1933 et le catalogue aux prix dépassés continue d'être utilisé... l'entreprise doit être en grande difficulté !

Quant à la forme :
Il compte 74 pages 21 x 27 cm (l'ancêtre du format A4), en noir et blanc. Deux pages seulement sont imprimées sur du papier de couleur, la page 16B qui présente l'essoreuse-calandreuse "ACME" et la 54B consacrée à la mèche à bois "Rapid" : il s'agit certainement là de mises en valeur spécifiques, facturées aux fournisseurs de ces produits.
Les pages sont largement illustrées de gravures de qualité, quelquefois signées par leurs auteurs, tels Poyet, Mackwitz, Dampenon & Delarue, ou Rodighiero... autant d'artistes trop méconnus !

Quant au fond :
Il s'agit clairement d'un catalogue de grossiste, tourné vers les ustensiles domestiques - le plus souvent français - et les outils à main et autres moteurs et pompes, importés de Grande Bretagne ou des Etats-Unis.
Les produits référencés se comptent par centaines, classés par familles et par ordre alphabétique, de l'affiloir jusqu'au wastringue. Dans cet inventaire à la Prévert, citons pour le plaisir : les concasseurs d'os, les dames de nage, les hachinettes, les nabauds à vis ou les sonneries de mine.
Les articles présentés ont souvent reçu un nom propre, déposé ou non, tels les couteaux à conserves Le Pratique et L'Econome, la baratte La Parfaite, le presse-bouchon Enterprise, la chaîne Hercule, la clé Bull Dog ou le piège à cafards Démon.


Le piège à cafards Démon.


La Maison Roux & Cie ne cite guère les fabricants français dont elle vend les produits : Dussieux et Pérille sont des exceptions, mais ne sont désignés que par leurs initiales : T.D. ou J.P.
Les fournisseurs anglo-saxons sont davantage cités : Enterprise MFG Philadelphia, The Covert Mig. C°, The Millers Falls C°, Tangye... il s'agit certainement d'exigences contractuelles.

Plus surprenant, aucun des ustensiles et outils proposés ne fonctionne encore à l'électricité : le virage n'a pas été pris par les dirigeants de l'entreprise.


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Alors en quoi ce catalogue est-il particulièrement intéressant pour nous ?

On y trouve quelques couteaux à conserves et ouvre-boîtes, dont un Pérille, une pince à dégoudronner, des machines à rincer les bouteilles L'incomparable et L'Inusable, une machine à boucher automatique (Sanbri ?), un presse-bouchon Enterprise.
Mieux, le catalogue compte deux pleines pages consacrées aux tire-bouchons Lund, Dussieux, mais surtout Pérille :








Un tire-bouchon en "T" bien marqué précède "l'Express" :




Notons encore pour les "périllophiles" et autres "périllomanes" que Roux & Cie commercialise 
l'entrebâilleur de porte ou arrêt de sûreté J.P. :




Ces mêmes experts auront reconnu les productions Pérille/Creuse des années 1925-1931. Ils se seront probablement étonnés comme moi de ne pas trouver dans ce catalogue de tire-bouchons extensibles, pourtant si nombreux à cette époque, y compris chez Pérille avec le Tric-Trac.


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Une nouvelle fois, un vieux catalogue s'offre à nous comme une machine à remonter le temps, nous permettant d'entrevoir la vérité du moment : la crise économique de 1929 et des années 30 entraînera probablement la fin de la Maison Roux & Cie, ligotée par des tarifs devenus impossibles à tenir et absente de la veille technologique, comme le montrent l'impasse sur les appareils électriques ou, plus modestement, celle sur les tire-bouchons extensibles !



M

 

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