vendredi 31 octobre 2025

VERNOUVAL, LA MANUFACTURE DE TIRE-BOUCHONS COVILLE



Amis blogueurs, bonsoir !


Ce n'est pas de l'urbex que je vous propose ce soir, ou alors seulement de l'urbex virtuel sur le site de :

La Manufacture d'Acier Poli Coville : 
le moulin de Vernouval à Magny-en-Vexin (actuel Val d'Oise)


Travaillant avec quelques amis à l'écriture d'un Cahier de l'Extracteur, Revue du CFTB, je souhaite partager avec vous, quelques résultats de nos recherches sur cette entreprise familiale à la production prolifique.


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Les Coville


Rappelons que Moïse Coville (1875-1933) et son frère Elie (1871-1952) n’étaient pas prédestinés à la fabrication de tire-bouchons : ils étaient établis comme marchands de beurre, œufs et fromages à Magny-en-Vexin.
Mais ils surent saisir en 1891 l'opportunité de reprendre le Moulin du Pont d’Hennecourt transformé en manufacture d’acier poli par Henri Crédot et Jean-Baptiste Boué, puis laissé par eux après la rupture de leur association.

Moïse Coville prend la tête de l’entreprise, ajoutant à l’usine du Pont d’Hennecourt un magasin au 26 rue de l’Entrepôt à Paris. S’entourant d’anciens salariés de la manufacture, dont certainement Auguste Louis (repreneur de Leboullanger et prédécesseur de Crédot), il apprend vite et développe l'entreprise. 

Une nouvelle opportunité s'offre à lui avec l'achat en 1906 du Moulin à blé de Vernouval, aux portes de Magny-en-Vexin. Cet énorme bâtiment sur l’Aubette, sera désormais l'Usine hydraulique et à vapeur de la Manufacture Moïse Coville.



CPA Moulin de Vernouval, 1907 (collection personnelle)



La vie familiale à Vernouval : 
photo Françoise Coville, petite-fille de Moïse Coville.


Au décès de Moïse Coville en 1933, son épouse Zina-Ambroisine, puis ses fils Roland, Bernard et Pierre lui succèdent jusqu’en 1972, année où Roland Coville rachète les parts de ses frères.
En 1985, la faillite de Martinaud, important client, et partie prenante dans des productions, entraîne le dépôt de bilan de Coville.
La Manufacture ne fabrique plus, mais Roland Coville et son épouse continuent de vivre au moulin de Magny-en-Vexin, jusqu’en 1997, année du décès de Roland Coville.
2001 : le Moulin de Vernouval est entièrement détruit par un incendie.


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Vernouval à l'Inventaire général 
des monuments et des richesses artistiques de la France.


En 1964, André Malraux, alors ministre des Affaires Culturelles, a une formidable intuition : il fonde l'Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France. 
Passons sur les complications administratives ultérieures, si chères à notre pays : transferts de compétences, échelons régionaux, départementaux, services, commissions, comités...
Retenons qu'en 1983, le comité, devenu service du pré-Inventaire du Val-d'Oise, est décentralisé au niveau du Conseil général (aujourd'hui Conseil départemental), et intègre la Direction des Affaires culturelles. Ce service comprend également la Conservation départementale des Antiquités et des Objets d’art.
Jusqu'en 1989, le service réalise des campagnes dites de pré-inventaire sur le territoire départemental.

Et c'est ainsi qu'en 1986 une campagne a - heureusement - concerné le Moulin de Vernouval. Les archives départementales du Val d’Oise conservent grâce à cela des diapositives sur Vernouval, ... orthographié Varnouval !
Ces diapositives ont dû être prises avant et après la fermeture de la Manufacture.

Des diapositives, bien sombres, nous montrent deux salariés au travail :



2468 W 9022 - intérieur de la fabrique de tire-bouchons.



2468 W 9023 - intérieur de la fabrique de tire-bouchons.


D'autres, certainement prises après la fermeture, montrent l'usine abandonnée :



2468 W 9013 - tourets à polir.


2468 W 9014 - intérieur de la fabrique de tire-bouchons et tourets à polir.


2468 W 9015 - forge.


Surtout, une précieuse série de diapositives présente bon nombre de productions Coville au moment de la fermeture ; les voici rassemblées :




Une grande diversité de modèles, de matières et de couleurs, et même un "régulateur", lequel quoiqu'incomplet, nous donne à rêver !



M



vendredi 24 octobre 2025

TABLETIERS ET TIRE-BOUCHONS

 
Amis blogueurs, bonjour !


Concernant la fabrication des tire-bouchons, il est des questions trop rarement évoquées.
Ainsi par exemple : 

Qui faisait les poignées en ivoire, os, corne ou nacre ? Celles en bois exotiques ? Celles en bronze ou en métaux précieux ?


L'art des manufacturiers d'acier poli se révélait dans l'imagination et la mise au point d'ingénieux mécanismes, leur polissage et leur assemblage, et pour quelques-uns dans la fabrication de mèches, ouvragées ou non.
Mais les poignées, nécessitant un montage associant l'acier à d'autres matériaux, étaient le plus souvent sous-traitées et c'était là que pouvait intervenir une corporation qui reste à étudier : celle des tabletiers, très représentée dans certaines régions, comme la Seine-Maritime autour de Dieppe, le Puy-de-Dôme autour de Thiers ou l'Oise autour de Méru.


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La tabletterie dans l'Oise


Selon Wikipédia, les "tabletiers", ou "ceux qui font tables à écrire", constituent une des premières organisations de métier, entérinée par le Livre des métiers d'Étienne Boileau, rédigé en 1268.
Les tabletiers (titre LXVIII) travaillaient l'ivoire, la corne ou le bois dur (hêtre, buis, cèdre, ébène, brésil, cyprès) pour fabriquer de minces plaquettes enduites d'une couche de cire, sur lesquelles on pouvait écrire avec un stylet et qu'on portait suspendues à la ceinture, telles les tablettes de cire.



Tablettes à écrire, étui et stylet vers 1330-1340 : 
des bloc-notes avant l'heure ! (Wikipédia)


Un statut de 1485 mêle dans la même corporation "peigniers et tabliers" et, en 1407, "peigniers, tabletiers, tourneurs et tailleurs d'image".
Les tabletiers fabriquaient déjà d'autres tablettes que celles à écrire : les tables de jeux, damiers et échiquiers, puis, en association avec les tourneurs, les pièces de jeux : pions, pièces d'échiquiers... ou, avec les déciers (fabricants de dés) : les dés à jouer, les dominos... 
L'association avec les peigniers leur offrait surtout un autre débouché : le sciage des os (de bœuf essentiellement) en plaquettes pour la fabrication des peignes.



Costume d'un Tabletier, vers 1700 (Image internet).


Au XVIIIe siècle, nous dit Laurence Bonnet dans son ouvrage "La nacre - la tabletterie, le bouton, l'éventail", les fabrications se sont considérablement diversifiées, entre :
- objets usuels : peignes, boutons, lunettes, cannes, souvenirs, éventails...
- objets religieux : croix et christs de buis ou d'ivoire...
- de nombreux jeux : échiquiers, damiers, lotos, trictracs, bilboquets, jeux d'osselets...
- boîtes : tabatières, étuis, coffrets, nécessaires...
... autant d'objets auxquels on peut ajouter les cornes à lanterne (diffuseurs de lumière) ou les cadrans d'horloge.
Les tabletiers travaillent aussi pour les couteliers, fabriquant et décorant les "côtes" fixées de part et d'autre de la "soie" des couteaux... c'est dire que nos tire-bouchons ne sont pas loin !

Leurs règlements corporatistes protégeaient les tabletiers, mais luttaient aussi contre les malfaçons ou les tromperies.
Laurence Bonnet indique ainsi que "les tabletiers n'avaient pas le droit d'associer des manches de couteau en os à des garnitures en argent, pour éviter que le client ne puisse confondre l'os avec l'ivoire, matériau plus noble."


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L'émergence des "ouvriers de métier"


L'outillage demandant peu de place en l'absence de machines, les tabletiers de l'Oise du XIXe siècle - et leur famille, femme et enfants -  travaillent le plus souvent à domicile, dans leurs "boutiques", petits ateliers installés au plus près de leur habitation, plutôt que dans l'usine d'un fabricant. Et ce système perdure, génération après génération.
C'est l'irruption du machinisme et la spécialisation des fabricants qui va entraîner le regroupement des ouvriers dans les usines, mais aussi dégager progressivement une élite ouvrière. Ces "ouvriers de métier" maîtrisent mieux que d'autres la conception des objets de tabletterie : après un long apprentissage, ils sont instruits, connaissent techniques et matériaux, savent dessiner, s'intéressent aux arts et à la politique. Ce sont ces "ouvriers de métier" qui sont à l'origine des premières organisations ouvrières : coopératives et syndicats, jusqu'aux grandes grèves de 1909, lors desquelles ils entraînent avec eux ouvriers, femmes et enfants.



archives.oise.fr


Mais surtout, les "ouvriers de métier" aiment innover, revendiquent la perfection dans l'exécution et parviennent ainsi à valoriser leur travail.


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Les "monteurs en acier"


Parmi eux, certains, probablement déjà sous-traitants pour des couteliers, vont s'intéresser à la fabrication de poignées adaptées aux tire-bouchons que fabriquent les manufacturiers en acier poli, comme ceux qui se sont installés à proximité à la fin du XIXe siècle : Jules Clément Hurel à Hermes et Adolphe Pecquet à Bailleul-sur-Thérain. 



Deux tire-bouchons Pecquet


L'exemple ci-dessus montre deux tire-bouchons en "T" de Pecquet :
- à gauche, la poignée est en os rivé sur ébène (ou bois teinté),
- à droite, la poignée est en corne blonde goupillée.
Si les mèches sont de qualité et correspondent bien à la raison d'être d'une manufacture d'acier poli, les poignées en os, bois ou corne, ne sont à l'évidence pas des fabrications "maison" et ont dû être sous-traitées.

La plupart des tabletiers s'essayant au façonnage de poignées s'arrêteront là et resteront à jamais anonymes, mais quelques-uns iront plus loin, jusqu'à assembler eux-mêmes les tire-bouchons.
Deux d'entre eux ont pu être identifiés : 

- Les Bailly-Duroyaume à Cauvigny,
François Xavier Bailly (1816-1893) est le premier à être identifié comme fabricant de tire-bouchons, traduisons : il devait être sous-traitant et monter des poignées en os, ivoire, nacre, bois… sur des tire-bouchons produits par des manufactures d’acier poli.
Son fils ainé, Eloi Xavier Désiré Bailly (1840-1905) et son épouse Antoinette Marie Claudine Duroyaume (1841- 1933), tous deux ouvriers en brosserie-tabletterie, reprennent la fabrication de tire-bouchons, devenant "monteurs en acier", peut-être pour Hurel ou Pecquet.



Kelly's Directory of Merchants, Manufacturers and Shippers - 1907 
(books.google.fr)

 
Leur fils, Arthur Bailly (1868-1926), leur succède et donne également comme profession "monteur en acier". La trace se perd après son décès.

- Achille Mallet à Mouchy-le-Châtel, figure lui aussi dans les annuaires de l'époque comme "monteur d’acier poli, tire-bouchons". 



 Annuaire statistique et administratif 
du département de l'Oise et du diocèse de Beauvais


D'autres "ouvriers de métier" ont certainement suivi le même chemin, donnant de belles poignées très travaillées, et dans les matériaux les plus divers, aux manufacturiers d'acier poli donneurs d'ordre. 




J'ai un faible pour ce petit tire-bouchon, patiné et usé par le temps, doté d'une banale mèche en queue de cochon, mais à la poignée de corne délicatement décorée d'un médaillon en forme de lyre entre des ailes déployées : imagine-t-on un manufacturier commander ce beau travail pour le doter d'une mèche aussi basique ? il est plus vraisemblable qu'un tabletier s'est plu à graver cette poignée sans trop se soucier de le doter d'une belle et solide mèche.


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Mais comment identifier les tabletiers "monteurs en acier" ? Peut-être avec des factures d'époque ?




M


P.S. : Frédéric, lecteur assidu, rappelle avec raison qu'un membre du CFTB, le regretté Georges Féret, avait été tabletier, même si c'était un peu plus tard.


dimanche 19 octobre 2025

BOURSE DES TIRE-BOUCHONS A BOURGES

 
Amis blogueurs, bonsoir !


Retour sur la Bourse du Club Français du Tire-Bouchon à Bourges ce samedi 11 octobre 2025.


Tout a été dit et présenté sur les réseaux sociaux : difficile donc d'en rajouter, d'autant que je n'ai guère fait de photos.
Un petit mot pour féliciter les organisateurs, Martine et Frédéric Romain : tout était parfait, ... sauf moi !



Restaurant "Les Petits Plats du bourbon", 
dans l'ancienne abbaye du XVIIe siècle (photos Martine Romain).


Ayant subi une petite opération au front, les amis (les amis ?) n'ont pas manqué de me brocarder :




Tous malades ? Tous scotchés ?


La farce, même à mes dépens, illustre la bonne ambiance qui régnait entre nous.


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Gérard Frobert


La bourse fut aussi pour nous tous une belle occasion de retrouver l'ami Gérard Frobert, ce grand multicollectionneur, venu avec quelques objets insolites :



Devant Martine Romain, Frédéric salue son parrain Gérard Frobert


Quelques-uns des objets appartenant à Gérard


On devine, à gauche sur ma photo, un sabot de cheval et son fer : Gérard Frobert collectionne aussi... les fers à cheval orthopédiques !


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Et les tire-bouchons ?


Je suis reparti content :
- essayant de pratiquer des prix raisonnables, j'en ai cédé quelques-uns,
- et j'en ai acheté deux : une poignée de bronze Gagnepain et un poisson Pecquet, qui suffisent à mon bonheur :




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Le retour


Nous sommes rentrés en groupe, par le chemin des écoliers, évitant toutes les lignes droites, chinant où nous pouvions, de l'Indre jusqu'à la Sarthe, de Reuilly jusqu'à Malicorne, ajoutant des trésors à nos trésors :





Tout ne vaut pas, mais tout me plait, du canif LE CLOU DE L'EXPOSITION DE 1900 au petit cadenas à la combinaison perdue ; du laguiole CALMELS au couteau publicitaire KOTO dont le slogan nous explique qu'il "donne du courage pour réussir dans la vie" ; et surtout la dague de vertu ou pique-couille, arme de défense des prostituées du XIXe siècle.


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On repart quand ?



M

jeudi 16 octobre 2025

ENIGMA N° 87 : QUI IDENTIFIERA LE TIRE-BOUCHON DE GERARD ROUSSELLE ?

 

Amis blogueurs, bonjour !


Je n'ai pas beaucoup de photos de la Bourse d'échanges du CFTB et ne sais pas si je pourrai rédiger rapidement un compte rendu...
Mais en attendant, c'est un fidèle lecteur, bien connu des collectionneurs français, Gérard Rousselle, qui nous propose l'article du jour :

ENIGMA N° 87 : LE TIRE-BOUCHON DE GERARD ROUSSELLE


Il nous demande simplement si nous pouvons l'aider à identifier une récente trouvaille : un tire-bouchon en "T" haut de 11 cm, non marqué, doté d'une mèche tranchante au fût simple et d'une poignée ressort longue de 10 cm.
Voici l'essentiel de son message
"J'ai fait dernièrement l'acquisition d'un tire bouchon dont j'ignore l'origine ? J'ai eu l'idée de l'apparenter "dans le goût de Pecquet", mais je n'en ai pas trouvé trace,  alors je me suis dit que je pourrais peut-être poser la question sur ton blog !?"
Voilà donc qui est fait !







Un cylindre de bois est inséré dans la poignée , comme c'est le cas pour deux tire-bouchons produits par Pecquet : le "4 As" n° 100 et le "Dentelle" n° 99 :



Catalogue Pecquet, page 13


C'est ce qui a conduit Gérard à se demander si Pecquet aurait pu être à l'origine de cette fabrication ?


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Par acquit de conscience, j'ai moi aussi vérifié dans mes catalogues Pecquet, mais je n'ai pas retrouvé ce modèle, ni rien d'approchant.
Et il me semble contradictoire de doter un tire-bouchon d'une poignée en ressort et d'entraver l'action de ce ressort par l'insertion d'un cylindre de bois.
L'examen des autres photos transmises par Gérard, me font plutôt pencher pour une fabrication artisanale, le fût de la mèche ayant été soudé à un ressort :








Mais peut-être connaissez-vous ce modèle ? Je serais heureux que vous livriez votre sentiment, si possible argumenté, à Gérard.
Merci par avance pour vos contributions.



M


jeudi 2 octobre 2025

TIRE-BOUCHONS : JHP ou J-P, LES MARQUES DE FABRIQUE DÉPOSÉES PAR PÉRILLE

 
Amis blogueurs, bonsoir !


J'ai évoqué dans un récent article 

les marques de fabrique déposées par Jacques Pérille.



Marque figurant au fronton de l'usine Pérille, 
retrouvée par Gérard Bidault




L'usine Pérille à Mouroux, avec le sigle au fronton



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Le contexte de la fin des années 1870


Le contexte, c'est celui du procès en contrefaçon intenté et perdu par Jacques Pérille contre Louis Eugène Trébutien :

- Jacques Pérille, champion avant l’heure de la « veille technologique », s’inspire de ce que fait la concurrence française, mais aussi anglo-saxonne, pour devenir fabricant, créer des modèles qu’il fait breveter et déposer ses propres marques.
- C'est ainsi qu'il présente en public en 1876 un "tire-bouchon à hélice", probablement inspiré des fabrications des américains Philos et Eli Whitney Blake, et dont il revendique l'invention : le modèle est retenu pour l'Exposition Universelle de Paris 1878 et va y obtenir un grand succès.
- Le premier brevet pour ce tire-bouchon à hélice est demandé par Pérille le 14 avril 1876 et obtenu le 16 juin 1876 sous le numéro 112 465 : il est donc antérieur à l'Exposition Universelle, mais postérieur à la présentation en public.
- Après l'Exposition, Louis Eugène Trébutien s'engouffre dans la brèche et copie sans vergogne le tire-bouchon à hélice de Pérille, nouveauté consacrée par son succès.
- Décidé à faire condamner Trébutien pour contrefaçon, et voulant renforcer ses arguments, Pérille dépose alors deux marques de fabrique le 26 février 1879 - donc après l'Exposition Universelle - auprès du Greffe du Tribunal de la Chambre de Commerce de la Seine.

Note : Les deux précieux documents qui suivent ont été retrouvés il y a quelques mois par notre amie Pascale Lhermitte et ont été reproduits dans mon livre "Tire-bouchons Français – Fabricants, Catalogues et Documents Commerciaux".



"JHP" - Dépôt de marque du 26 février 1879 
enregistré au Greffe du Tribunal de Commerce de la Seine sous le n° 12 600.



"Tire-bouchons à hélice" - Dépôt de marque du 26 février 1879 
enregistré au Greffe du Tribunal de Commerce de la Seine sous le n° 12 601.


- Mais ces démarches a posteriori ne changeront pas le cours du procès, la Cour de cassation rejetant un ultime renvoi de Jacques Pérille le 26 janvier 1884.
- De nombreux autres fabricants copieront alors à leur tour le tire-bouchon à hélice de Pérille. Le procès fait jurisprudence et la leçon retenue du plus grand nombre : il faut protéger avant d'exposer !


Il me fallait rappeler ces faits, mais ce n'est pas là le propos du jour. C'est sur la première marque de fabrique déposée que j'attire votre attention :


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JHP et non JP !




Extrait du dépôt de marque JHP N° 12 600


Le déposant mandataire de Jacques Pérille précise bien : 
"Ladite marque se compose des lettres J H P groupées comme ci-contre et pouvant être reproduites seules, ou en combinaison avec un cercle, un compas, etc... etc."
Le sigle est donc bien composé des lettres J H P groupées... et non J P ! 


L'acte de baptême de Pérille est pourtant sans équivoque : fils d'André Pérille (1813-1892) et Madeleine Emerencienne Hattier (1818-1894), il est né le 22 décembre 1837 à Joigny (Yonne) et a été prénommé Jacques Augustin, sans autre prénom commençant par la lettre H.



Acte de baptême de Jacques Augustin Pérille


A quoi pouvait donc correspondre la lettre H ? 
Nous ne le saurons probablement jamais, mais les contemporains de Pérille ont préféré y voir ses seules initiales J et P, reliées par un tiret.
Et nos fondateurs, de bonne foi, s'y sont fait prendre. 
Gérard Bidault écrit ainsi, dans "Les tire-bouchons français - Modèles et fabricants" :
Le sigle "JP" déjà déposé par Jules Piault avant lui, sera assemblé comme on le connaît par une barre de liaison. Il est, durant les premières années de fabrication, surmonté d'un compas. Ceci étant clairement établi, qu'on ne parle plus jamais de J.H.P."

Et pourtant il le faudra, jusqu'à pouvoir expliquer la raison de la présence de ce "H" !


Additifs du 5 octobre 2025 :

1. En commentaire à cet article, notre ami Lionel évoque une possibilité : la mère de Jacques Pérille est née Hattier avec un bel "H" . Il y a d'ailleurs une magnifique signature sur l'acte de naissance de Jacques avec "Pérille Hattier". Ne faut-il pas voir ici cette présence originale du H dans JHP ? 

2. J'y avais aussi pensé, mais en 1879, Jacques Augustin Pérille a 42 ans, et est marié depuis 17 ans à Marie Emelie Regniaud. Au XIXe siècle, associer le nom de son épouse était fréquent, mais pas celui de sa mère au détriment de celui de son épouse... Bien sûr, on ne peut écarter définitivement ton hypothèse. J'avais aussi essayé de rechercher d'éventuels descendants, lesquels auraient peut-être pu nous aider à comprendre, mais parmi les trois fils de Jacques Pérille, seul André Henry s'est marié et aucun ne semble avoir eu d'enfants...

3. Cf. mon livre "Tire-bouchons français - Fabricants, catalogues et documents commerciaux" :
En 1909 encore, lors de la prorogation de leur société, les Fils de Pérille confirment : le "groupement des lettres J.P. imprimées en mêmes caractères et avec la même combinaison de couleurs, est entrelacé de la même manière que les lettres J.P. de la société J. Pérille et de façon à former les lettres J.H.P." … pas "J-P", mais "J.H.P.", comme leur père avait enregistré sa marque quelques trente ans plus tôt !


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Une autre marque déposée par Jacques Pérille


Il est difficile de retrouver une marque de fabrique parmi les dizaines de milliers déposées à la fin du XIXe siècle et conservées par familles de métiers et par ordre chronologique sur le site de l'Institut National de la Propriété Industrielle (INPI).
Ne pouvant effectuer une recherche à partir des noms des déposants, il est impossible de lister de manière certaine et exhaustive leurs marques de fabrique successives.

Concernant Jacques Pérille cependant, nous avons retrouvé un autre dépôt de marque en 1892, pour le tire-bouchon DIAMANT qui avait été breveté en 1888 :



"Diamant" - Dépôt de marque du 11 octobre 1892
enregistré au Greffe du Tribunal de Commerce de la Seine.



La marque réunit bien les lettres JHP, comme l'avait voulu Jacques Pérille, suivies des mentions PARIS. Bté S.G.D.G. N° 186.560 24 OCT. 1887. DEPOSE.
Le brevet avait été délivré le 19 janvier 1888.


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Et le dépôt de marque nous offre - comme une preuve - la signature de Jacques Pérille :






M


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