Amis collectionneurs, bonjour !
Le ZIG-ZAG est un tire-bouchon qui me plait et il vaut bien que j'y m'y intéresse à nouveau : c'est à ma connaissance le seul tire-bouchon imaginé et fabriqué en Lorraine...
L'article que je vous propose est une reprise actualisée d'un article que j'avais consacré au ZIG-ZAG il y a deux ans, un des articles préférés des lecteurs du blog.
La période est propice à cette nouvelle parution : le congrès CFTB de Metz se prépare en effet. Ce sera le deuxième congrès organisé en Lorraine après celui que nous avions organisé à Nancy en 2005 et pour lequel nous avions choisi comme cadeau souvenir le ZIG-ZAG.
La période est propice à cette nouvelle parution : le congrès CFTB de Metz se prépare en effet. Ce sera le deuxième congrès organisé en Lorraine après celui que nous avions organisé à Nancy en 2005 et pour lequel nous avions choisi comme cadeau souvenir le ZIG-ZAG.
Le ZIG-ZAG étant - avec le DEBOUCHTOUT - le seul tire-bouchon inventé en Lorraine, je le ressors aujourd'hui de sa boîte pour saluer la nouvelle organisation d'un congrès en Lorraine.
Mais ce tire-bouchon là ne sera pas remis aux congressistes en cadeau souvenir : ça a déjà été fait !
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Mon article s'appuie sur les ouvrages de Gérard Bidault, Jacques Lapierre et Hans J. Türler.
J'ai présenté leurs ouvrages références dans deux de mes fiches bibliographiques :
Merci aussi à Loïc Bahuet qui m'avait fourni des renseignements complémentaires sur des brevets déposés par Jules Bart.
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Marie-Jules, dit Jules Bart, est né en 1893 à Saint-Clément, village proche de Lunéville, à une quarantaine de kilomètres au sud-est de Nancy.
Son père y était établi comme ferblantier, sa mère y exerçait la profession de gantière.
Jules Bart fait ses débuts professionnels dans l'atelier de son père, avant d'être mobilisé en 1914.
Fait prisonnier la même année, il passe la guerre dans un camp de prisonniers en Allemagne.
Cette période sombre le marque profondément, on le verra plus loin.
Jules Bart met cependant à profit sa captivité pour concevoir le projet de l'entreprise qu'il entend créer à son retour et pour imaginer notamment des ustensiles de cuisine : tire-bouchons, ouvre-boîtes, presse-purée... qu'il compte y fabriquer.
Rendu à la vie civile et à la liberté, Jules Bart fonde une famille. Il se marie et deux fils naissent de ce mariage, Jean et Roger.
Il crée aussi très vite son entreprise et s'établit comme "constructeur-mécanicien", au 4 rue Molitor à Nancy, avant de déménager au 14 rue du Placieux, toujours à Nancy.
Le déménagement de l'entreprise est attesté par le Bulletin de la Société Industrielle de l'Est n° 167 de 1922 :
Installation de Jules Bart au 14 rue du Placieux à Nancy
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Jules Bart est un industriel ambitieux et inventeur prolifique. Ses brevets en témoignent.
Sa première demande de brevet pour le tire-bouchon ZIG-ZAG suit de peu son retour à la vie civile : elle date en effet du 17 septembre 1919, le brevet lui ayant été accordé le 29 mars 1920 sous la référence n° 503.957.
Source : Les brevets de tire-bouchons français par Gérard Bidault
Un brevet pour un deuxième tire-bouchon suit celui du ZIG-ZAG : il concerne le DEBOUCHTOUT, autre extensible, présenté comme un additif au brevet 503.957 ; demandé le 18 novembre 1927, il est délivré le 19 février 1929,
Deux versions du DEBOUCHTOUT
Un autre encore, demandé peu après, concerne une évolution du ZIG-ZAG qui le dote de "décapsulateurs" ; il s'agit du brevet n° 674.209 demandé le 17 février 1928 et délivré le 27 août 1928.
Le ZIG-ZAG, avec ou sans "décapsulteurs".
Mais l'ingéniosité de Jules Bart ne limite pas aux tire-bouchons :
Il obtient un brevet pour un "ouvre-boîtes de conserves", le TOUTYP, marqué Breveté S.G.D.G., Marque et Modèle déposés, connu en deux tailles :
Grand et petit TOUTYP
Ce brevet du TOUTYP a été demandé le 09 juillet 1929 et accordé le 23 décembre 1929 sous le numéro 678.075 :
Les dessins joints à la demande correspondent au grand TOUTYP.
Loïc Bahuet a retrouvé un autre brevet pour un ouvre-boîte dont la conception est proche de celle des modèles SINGE ou BIZIN, le voici :
Un autre ouvre-boîte breveté par Jules Bart : brevet 760.984,
demandé le 20 septembre 1933 et accordé le 27 décembre 1933
Jules Bart a peut-être breveté aussi le presse-purée MOUSSE qu'on retrouve sur les en-têtes de documents des Ateliers Jules Bart, mais nous n'avons pas trouvé la trace d'un tel brevet.
Presse purée MOUSSE
Loïc Bahuet a retrouvé de son côté un brevet pour un autre moulin à légumes au modèle ressemblant au MOUSSE, mais actionné par une manivelle tournante. En voici les dessins :
Moulin à légumes : brevet 763.192
demandé le 30 octobre 1933 et délivré le 05 février 1934.
Enfin, Jacques Lapierre et Hans J. Türler nous ont appris que Jules Bart fabriquait aussi et vendait des bougies TURBY pour moteurs automobiles.
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Pour en revenir au ZIG-ZAG, son succès est impressionnant au point qu'en France ce nom commercial est passé dans le langage commun pour désigner tous les tire-bouchons extensibles.
Jules Bart s'était probablement inspiré de modèles antérieurs : les extensibles anglais, type Heeley ou Armstrong.
Mais le ressort de rappel qui caractérise son invention le rend à la fois très original, ergonomique et ludique. Et la qualité de la fabrication place le ZIG-ZAG parmi les tire-bouchons haut de gamme.
Avec le temps, les bons résultats obtenus à la vente excitent cependant la concurrence et d'autres tire-bouchons extensibles, moins perfectionnés donc également moins chers, apparaissent sur le marché.
Au point que le succès du PERFECT, copie bon marché du RELIABLE américain par Martenet, décide Jules Bart à réagir en proposant le DEBOUCHTOUT, finalement peu différent.
Mais cette réaction est tardive, d'autant qu'avec les années 30, d'autres fabricants arrivent à leur tour sur ce marché des extensibles, notamment la M.F.A.P. avec le KIS-PLY, le KISTOP et le POLICHINELLE.
Manifestement inspiré du DEBOUCHTOUT,
LE PRATIC (fabricant non identifié).
L'entreprise souffre, même si le ZIG-ZAG résiste sur le haut de gamme.
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Les années 30 sont aussi celles de la montée des fascismes en Europe.
Or, on l'a dit, Jules Bart est resté fortement traumatisé par la première guerre.
C'est ce qui explique qu'en 1938, alors que se précise l'imminence d'un nouveau conflit, il décide de quitter la Lorraine pour aller s'installer à l'autre bout de la France : à Mortagne-sur-Sèvre, en Vendée.
Il y achète le moulin du Pont Vieux, moulin attesté depuis le XII° siècle, et y transfère l'ensemble de sa production, laquelle se poursuivra sans discontinuer jusqu'en 1956.
Le moulin du Pont Vieux à Mortagne-sur-Sèvre
(Delcampe)
Avec la seconde guerre mondiale, le destin de Jules Bart se répète à travers celui de Jean, son fils aîné, qui est déporté STO et ne rentre en France qu'à la Libération.
Les projets semblent reprendre alors : l'entreprise ouvre un bureau commercial à Paris. Mais Jules Bart décède prématurément à Mortagne-sur-Sèvre en 1946, âgé de seulement 53 ans.
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Jean et sa mère reprennent alors l'activité, l'entreprise devenant la "Société des Ateliers Jules Bart et ses Fils" jusqu'en 1957.
En 1958, Roger, le second fils de Jules Bart, et qui n'apparaissait pas jusque là dans l'organigramme de l'entreprise, prend le relais et fonde la "Société en nom collectif Veuve Jules Bart et son fils successeur".
Cette société perdure et reste spécialisée en quincaillerie. Depuis 2010 elle est codirigée par le fils et la petite-fille de Jules, Roger et Renée.
Mais dès 1958, les droits et la production des tire-bouchons ZIG-ZAG et DEBOUCHTOUT ont été cédés à la société TIMECA de Cahors, laquelle poursuit la production du ZIG-ZAG.
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Les hélixophiles le savent, les lignées entrepreneuriales ne sont jamais simples dans le monde des tire-bouchons.
En voici une nouvelle illustration : avec l'aide et les conseils de Roger Bart, le repreneur TIMECA rachète en 1965 la société Boileau !
Boileau racheté ! Le père des extensibles l' ECLAIR et le RAPID, mais aussi d'un bouchon doseur nommé IDEAL et fabriqué en très grandes séries !
TIMECA prend alors le nom d'établissement BOILEAU ZIG-ZAG ET TIMECA REUNIS et cette société est active jusqu'en 1976.
Deux produits au moins continuent d'être fabriqués : le ZIG-ZAG et le bouchon doseur IDEAL, dont le nom va bientôt servir de raison sociale à l'entreprise.
En 1976 en effet, la société ayant pris le nom de L'IDEAL, succède à BOILEAU ZIG-ZAG et TIMECA, avant de racheter encore le fabricant de doseurs DOSVER en 2002.
Document de présentation de la société L'IDEAL sur le Net
Et la société L'IDEAL, entre ses sites de Cahors et Vienne, continue de produire des tire-bouchons, parmi lesquels : nos ZIG-ZAG !
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Au fil du temps, la qualité de fabrication a beaucoup varié, pas forcément en mieux :
- les "décapsulateurs" - devenus décapsuleurs aujourd'hui - sont apparus en 1928,
- les poignées ont été successivement fabriquées en bronze, en acier massif, en tôle emboutie (seconde guerre mondiale), en zamac (alliage zinc et aluminium),
- le texte du marquage est resté le même :
BTE S.G.D.G.
Fr & Ét
M. & M. DÉP.
mais les deux derniers chiffres de l'année de fabrication ont cependant été rajoutés,
- les mèches, d'abord tranchantes, sont remplacées par des mèches en queue de cochon.
L'IDEAL poursuit aujourd'hui l'aventure commencée il y a un siècle. C'est donc naturellement que nous nous étions adressés à elle en 2005 pour faire fabriquer les ZIG-ZAG souvenirs du congrès de Nancy.
ZIG-ZAG de L'IDEAL et sa boite,
marquage : 10° CONGRES CFTB NANCY 2005
L'accueil dans l'entreprise cadurcienne L'IDEAL fut très chaleureux et le directeur, pourtant quasi-dépourvu d'archives, voulut bien me céder quelques extraordinaires catalogues Pecquet !
L'IDEAL, ex-TIMECA, en rachetant Boileau, avait aussi racheté les acquisitions antérieures d'Amédée Boileau, soit Baradat et la marque Pérille en 1938..., mais aussi plus loin dans le temps l'héritage de l'entreprise Pecquet - d'où les catalogues - et, last but not the least, la manufacture Trébutien !
Et c'est ainsi que les ZIG-ZAG de Jules Bart sont finalement tombés dans l’escarcelle des héritiers de Trébutien et de Pecquet !
M
il n'y a aucun ressort de rappel dans ce tire bouchon !
RépondreSupprimerBonjour.
RépondreSupprimerMerci pour votre commentaire que je découvre tardivement.
Le ressort de rappel se trouve dans la poignée. Cf. Dessin du brevet dans le corps de l'article.
Cdlt.
M