Amis hélixophiles, bonjour !
Ou peut-être plutôt : Ciao, Amici elixofili !
Dans la rubrique WHO'S WHO de ce Blog, je vous ai présenté beaucoup de collectionneurs chevronnés, des pionniers, des experts, le plus souvent connus de la plupart d'entre vous. Vous pouvez relire ces articles dans ma rubrique WHO'S WHO, accessible en page d'accueil, colonne de gauche.
J'aimerais y ajouter à présent quelques portraits de collectionneurs "différents".
J'espère que ces portraits rassureront les "anciens" sur la qualité des "modernes" ; j'espère aussi qu'ils inciteront de nouveaux collectionneurs à rejoindre nos clubs.
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Le héros du jour est un italien encore quadragénaire :
Rino SAUTA
A quelques jours du Congrès de l'Associazione Italiana Collezionisti Cavatappi, lequel aura lieu en Sardaigne, à Sassari – Alghero, il me paraissait bien d'évoquer un membre de ce Club.
Notre ami Armando Cecconi, président de l'AICC, m'a décrit Rino comme un jeune homme gai, imaginatif et très entreprenant, qui crée des œuvres très personnelles : tire-bouchons géants en fer, dessins très inspirés, vidéos curieuses et amusantes... un artiste !
De quoi donner l'envie de mieux le connaître donc, ce que nous allons pouvoir faire puisque Rino a bien voulu répondre à mes questions.
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Hélixophile par passion et par profession
Question : Pouvez-vous vous décrire en quelques lignes : origines, lieu de vie, âge, situation familiale, profession exercée et secteur d'activité...?
Réponse : Je m’appelle Rino Sauta, je suis né en Sicile (sur l’Etna) en 1973. Je vis dans le Piémont dans la province d’Alessandria où sont produits des vins de qualité, je suis marié, j’ai un fils et je suis sommelier qualifié.
Un sommelier hélixophile et qui en parle...
Q. A l'origine d'une collection, il y a généralement un événement déclencheur : qu'est-ce qui vous a amené à collectionner les tire-bouchons ?
R. J'ai reçu mon premier tire-bouchon il y a plus de trente ans. C'était un cadeau de mon grand-père : le Chinois (je l'appelle Fu Manchu). Fabriqué au milieu du XXe siècle en Allemagne, il fait partie des premiers tire-bouchons que mon grand-père m'a offert et c'est celui que j'aime le plus. Puis au fil des ans j’ai développé ma passion pour ces objets et j’ai continué à agrandir la collection.
Le Chinois, cadeau du grand-père de Rino.
Q. Combien de tire-bouchons estimez-vous posséder ?
R. Aujourd’hui, dans ma collection, j’ai 1925 tire-bouchons.
Q. Vraiment ? 1925 tire-bouchons ? Pas 1924 ou 1926 ?
R. Tous sont enregistrés et il m'est donc facile de répondre à votre question. En fait, j'adore le classement, l'organisation, la précision et les moyens informatiques permettent tellement de choses aujourd'hui... vous devriez essayer !
Q. Trop tard pour moi : je suis incapable de dire combien je possède de tire-bouchons, même pas à la centaine près !
Mais avez-vous des préférences pour certaines catégories de tire-bouchons ? Lesquelles et pourquoi ?
R. J’adore les tire-bouchons et sommeliers figuratifs. Particulièrement ceux qui représentent les femmes parce les femmes sont ce qu'il y a de plus beau au monde et donc les tire-bouchons qui les représentent se doivent d'être eux-mêmes très beaux. Les tire-bouchons figurant des diables ou d’autres figures effrayantes m’inspirent artistiquement. J'aime aussi les tire-bouchons de poche et les tire-bouchons à mécanisme parce que je les utilise souvent pour ouvrir des bouteilles de vin.
Sommeliers figuratifs.
Enfin, j'aime beaucoup les tire-bouchons à parfum et suis toujours surpris de les voir négligés par de nombreux collectionneurs.
cavatappi profumi, les tire-bouchons à parfum.
Q. Quels lieux ont votre préférence pour acheter des tire-bouchons et lesquels conseilleriez-vous aux nouveaux collectionneurs : salles de ventes, antiquaires, brocantes, Internet...
R. J’aime acheter dans les marchés aux puces (j’y assiste tous les dimanches depuis 2006) dans différentes villes italiennes et je conseille aux nouveaux fans de faire de même : sur les marchés, il arrive de trouver de belles pièces également excellentes pour commencer une collection. Depuis 2008, comme beaucoup d'entre nous, j’achète dans le monde entier sur Internet sur divers sites d’enchères.
Les nouvelles technologies : une nouvelle façon de collectionner
Q. Le phénomène majeur de notre génération est effectivement l'irruption du numérique dans notre quotidien. Vous semblez être un expert de ces technologies numériques. Pouvez-vous nous dire comment vous les utilisez au service de votre collection ?
R. J’utilise toutes les nouvelles technologies et j’aime suivre le rythme, "rester dans le coup" comme vous dites en France. J’achète, vends, classe, crée et communique de plus en plus souvent via l'outil informatique. J’utilise Excel pour garder mes archives à jour afin de savoir combien je possède de tire-bouchons et où ils se trouvent : c'est que j’ai beaucoup de vitrines et que j'ai jugé utile de les référencer.
Depuis 2018, je fais des captures d’écran systématiques sur les ventes de tire-bouchons supérieures à 50 euros trouvées sur les différents sites que je suis pour apprécier la fluctuation des prix et analyser les marchés internationaux les plus adaptés à la vente. Dans mes archives, j’ai près de 2000 fichiers divisés en dossiers par années et par mois.
Q. Je pense que votre approche renouvelle la façon de collectionner. J'espère que vous aurez à cœur de partager la documentation que vous avez amassée. Un livre ou un site peut-être ?
R. Pourquoi pas ? Je crée déjà des œuvres d'art numériques...
"Je porte toujours un tire-bouchon sur moi"
Q. Nous y reviendrons, mais restons encore sur votre vie de collectionneur. Pouvez-vous nous raconter une anecdote qui a marqué votre parcours : rencontre, scène de vie, trouvaille inespérée... ?
R. Il faut commencer par dire que j'ai toujours collectionné. J’ai commencé à accumuler des pièces de monnaie à l’âge de huit ans (j’ai toujours gardé cette petite collection). Environ dix ans plus tard, je vous l'ai dit, le tire-bouchon est apparu dans ma vie avec le cadeau de mon grand-père. En grandissant, je suis passé pendant un certain temps aux voitures anciennes et aujourd’hui, je me concentre principalement sur le tire-bouchon.
J’aurais beaucoup d’histoires et de découvertes à raconter, mais celle qui me vient à l’esprit maintenant et me fait sourire à nouveau est la suivante : un jour, lors d’un événement il y a quelques années, il y avait des bouteilles de vin à déboucher - je précise que je n’étais pas de service, mais seulement invité - et soudain toutes les personnes présentes se sont regardées parce que personne n’avait de tire-bouchon. J’ai été le plus choqué de tous en tant que sommelier et collectionneur et depuis lors, je jure que je porte toujours un tire-bouchon avec moi.
J'ai bien sûr repensé à cette anecdote en retrouvant dans votre livre celle, très amusante, racontée par Lord Sandwich : le sommelier n'avait pas de tire-bouchon, mais chacun des dix prêtres présents "mit la main à la poche pour offrir le sien".*
* NDLR : Lord Sandwich, cité par La Gazette Littéraire du 10 juin 1830 : "Le sommelier à qui on avait fait le mot fit semblant d'avoir perdu son tire-bouchon, et aussitôt chacun de ces messieurs [les dix prêtres présents] mit la main à la poche pour offrir le sien." (Marc Ouvrard, Le tire-bouchon aux XVIIe et XVIIIe siècles, p. 157).
Q. Et aujourd'hui, collectionnez-vous encore d'autres objets ? Avec autant de passion que les tire-bouchons ?
R. Certainement, mais mes collections sont en cohérence avec ma passion et ma profession !
Je possède 144 siphons pour le champagne et quelques centaines d’objets (anciens ou non) qui racontent l’histoire de ce vin que j’aime à travers le marketing de 1700 à aujourd’hui. Ensuite, j’ai aussi une collection de coupe-cigares que je développe, des bouteilles en verre anthropomorphiques, des fûts en bois, des embouteilleuses, des dames-jeannes, des tastevins, des pots en métal et des caisses en bois de vins fins, et plus encore autour de l'alcool.
Collectionner les tire-bouchons
comme autant de sources d'inspiration pour raconter et créer
Q. Quel sens revêt pour vous votre collection : un challenge personnel ? un sujet d'études ? un investissement ? une occasion de rencontrer des gens partageant votre passion ?...
R. Collectionner les tire-bouchons aujourd’hui signifie pour moi beaucoup de choses, principalement créer des projets artistiques et culturels pour diffuser cette passion. La collection m’aide à exprimer d’une manière inhabituelle la passion pour le vin à ceux qui, comme moi, sont des disciples du Dieu Bacchus. J’aime suivre l’évolution de cet instrument au fil des siècles et le faire découvrir de manière tangible à ceux qui aiment le vin, donc à d’autres "assoiffés" de culture. C’est certes un investissement, mais pas seulement économique.
Je pense pouvoir dire que ma collection d’aujourd’hui est pour moi un moyen de m’entourer d’histoires à raconter.
Q. Nous sommes aujourd'hui à un tournant de l'hélixophilie : la génération des fondateurs est vieillissante, mais nous rencontrons aussi de plus en plus de nouveaux collectionneurs. Quel message passeriez-vous à ces jeunes collectionneurs pour les aider dans leurs débuts ?
R. Ayez toujours de la curiosité et collectez ce qui remplit votre cœur et votre cerveau, car ceux qui collectent juste pour gagner de l’argent sont seulement des commerçants.
Q. Vous pouvez répondre aussi si vous le désirez à des questions que je ne vous ai pas posées...
R. Ma passion pour le tire-bouchon va au-delà de la collection : ayant en fait des compétences artistiques, j’ai créé environ 280 œuvres d’art numérique et 30 tire-bouchons géants conçus, sculptés et décorés à la main sur des plaques de métal. J’écris aussi des fictions.
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J'aime dire que "chaque collectionneur est différent et collectionne à sa façon" : notre héros Rino le prouve à sa manière !
Merci à lui d'avoir bien voulu répondre à mes questions.
M
Interesting story. Great to hear about strong younger collectors.The translation is fun. In English Rene Sauta becomes Rene "Jumped".
RépondreSupprimerMerci Ian, pour ce commentaire sympathique et humoristique ! Quand puis-je vous interviewer pour le blog des tire-bouchons ? Merci de me répondre à l'adresse mail du blog : leblogdestirebouchons@gmail.com
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