mercredi 25 septembre 2013

HELIXOPHILES, APPERTOPHILES : UN MAILLON MANQUANT ?





 
 
Amis amateurs ou collectionneurs, bonjour !

 
 
Les paléontologues et archéologues trancheront sûrement un jour pour savoir
qui de l'homo appertophilus ou de l'homo helixophilus, est apparu en premier
dans l'évolution de l'espèce humaine.
 
 
Les tenants du premier rappelleront que c'est au Français Nicolas APPERT (1749-1841) que l'on doit l'invention de la conservation par stérilisation, d'abord en bouteilles en verre, puis en boites en fer-blanc, en 1795.
Les autres rétorqueront que le premier brevet jamais déposé pour un tire-bouchon l'a été par Samuel Henshall, pasteur anglais (1765-1807), le 24 septembre 1795*.
 


* Cf. le livre référence de Fletcher WALLIS : British Corkscrew, Patents from 1795.
 Vernier Press, 1997, ISBN : 1 898825 05 X
 
Page 13, fin de la demande de brevet déposée par Samuel HENSHALL :
 "In witness whereof, I have hereunto set my hand and seal, this Twenty-fourth day of September, in the year of our Lord thousand seven hundred and ninety-five".
 ou, en Français :
 "En foi de quoi, j'ai apposé mon seing et sceau, ce vingt-quatrième jour de septembre, en l'an de grâce mille sept cent quatre-vingt - cinq".

N.B. : Je dresserai prochainement la fiche bibliographique de ce bel ouvrage.

 
 
 
1795 dans les deux cas !
Une coïncidence qui ne nous aide pas !
 
 
Pour le brevet anglais, la date est précise, mais n'oublions pas qu'en France,  il faut attendre 1811 pour que la protection de la propriété industrielle soit formalisée. 
 
 
Pour compliquer un peu notre affaire, il faut bien admettre que si Nicolas APPERT utilisa au départ des bouteilles en verre à large col, de nombreux consommateurs utilisaient depuis longtemps des tire-bouchons pour ouvrir d'autres bouteilles, de vin principalement.
 
Le tire-bouchon serait-il donc apparu en premier ?
Pas sûr !
 
 
Entrons encore un peu plus en complexité.
 
Bien des récipients bouchés étaient utilisés depuis la plus haute Antiquité pour le transport et la conservation de produits, notamment alimentaires.
En Europe, amphores et jarres au sud, tonneaux et outres au nord, répondaient à ces besoins.
Des contenants pouvant être scellés et ayant vocation à contenir, conserver et transporter des marchandises : ... des "boites" en quelque sorte,
... et qu'il fallait pouvoir ouvrir.
 
C'est dire qu' avec ou sans brevet, des "ouvre-boites", même improvisés, ont été utilisés depuis plusieurs millénaires.
 
 
On nous objectera que les véritables boites de conserve ne sont apparues qu'avec Appert, et que les outils spécifiques destinés à les ouvrir n'ont pu - au mieux - que leur être contemporains.
 
 
On nous rappellera d'autre part que l'usage de pots, cruches ou bouteilles (latin : ampulla, notre ampoule), particulièrement les bouteilles en verre, était également largement répandu dans l'Antiquité.
Mais les spécialistes répondront que les bouteilles en verre étaient des bouteilles soufflées et non moulées, de formes, d'épaisseurs et de contenance irrégulières, impropres à la conservation ou au transport, et qu'elles étaient donc réservées au service de liquides (huile, vin, eau ...) prélevés dans les amphores ou tonneaux.
 
La bouteille de service ne nécessitait pas un bouchage hermétique, à la différence des récipients utilisés pour le transport sur de longues distances.
 
Pas besoin donc du tire-bouchon ... qu'on n'avait pas encore inventé !
 
 
 
Au Moyen-Âge, le commerce du vin est largement dominé par les Anglais qui interdisent le transport en bouteilles, source de fraudes, de casse, de dégradation qualitative.
 
Il faut attendre le début du XVII° siècle  pour que soit maîtrisée et diffusée la fabrication standardisée de la bouteille.
On attribue cette invention de la bouteille de vin moderne à l'Anglais Kenelm DIGBY en 1634.
La bouteille au goulot cylindrique et renforcé est alors fermée d'un bouchon de liège tronconique enfoncé au maillet.
Et un poinçon, une pointe, faisant levier sur le bord du goulot suffit à ouvrir la bouteille.
 
Mais la fermentation du vin suffit souvent à chasser ce bouchon tronconique et la bouteille ne peut voyager couchée.
La solution vient bientôt du bouchon de liège cylindrique, d'un diamètre supérieur à celui, intérieur, du goulot de la bouteille, et suffisamment élastique pour être forcé dans le goulot.
 
Nous sommes au XVII ° siècle
et le tire-bouchon s'impose comme une nécessité !
 
De toutes parts des inventions vont naître faisant preuve de la plus folle imagination pour ouvrir des bouteilles.
 
 



Source Wikipedia : deux bouteilles XVIII° siècle, à vin de Meuse, dites « voleuses », du Musée de la Gourmandise à Hermalle-sous-Huy en Belgique.


 
 
 
Au final, il semble juste de prétendre que :
1. L'outil est contemporain du besoin.
On a ouvert des récipients depuis des millénaires et donc on a ouvert des boites avant de tirer des bouchons.
 
Mais,
2. L'outil est aussi spécifique à son objet.
L'ouvre-boite au sens actuel du terme suit l'invention de la stérilisation et l'utilisation de la boite en fer-blanc (1795),
comme le tire-bouchon a suivi l'invention de la bouteille moderne (1634).
 
Il est donc juste d'affirmer que l'homo hélixophilus a précédé l'homo appertophilus !
 
 
Il resterait à se demander si ces deux espèces sont susceptibles de s'hybrider, comme l'ont fait jadis homo sapiens et homo neanderthalensis ?
 
Il faudrait un autre article pour examiner cette question, mais on peut d'ores et déjà répondre que c'est probable : il doit exister  des "hélixo-appertophiles", puisqu'il existe des outils à la fois tire-bouchons et ouvre-boites, sinon plus !
 
En voici un seul exemple :
 
 
Il s'agit du "4 in one", modèle léger, fabriqué par Vaughan Novelty Mfg Co., société américaine fondée à Chicago en 1910.
 
 
Avec l'aide de Daniel NEVEU, éminent appertophile, je vous en présenterai très vite quelques autres,
 
mais pourquoi pas des photos des vôtres ?
 
 
J'espère vos envois !
 
 
M
 




 

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